Morondava confrontée à l’érosion de son littoral
Morondava confrontée à l’érosion de son littoral
25.10.2016 Notes du passé
Depuis le XXe siècle, les habitants de la ville de Morondava assistent à des avancées ou des reculs appréciables de la plage, « sans qu’aucun danger immédiat pour la ville ne se manifeste alors » (lire précédente Note). Ce n’est que pendant les hivernages 1953 et 1954, durant lesquels une centaine de mètres de plages sont grignotés, que la mer pénètre à plusieurs reprises, dans les rues de la ville proches du littoral, au cours de marées particulièrement violentes. « L’émotion fut grosse à Morondava et, à certain moment, sous le coup du désarroi, il fut question de l’abandon de la ville, dont les installations devaient être transférées à l’intérieur des terres », écrit à l’époque un responsable.
Ce dernier estime qu’il est bien d’éclairer l’opinion publique sur la situation de cette période. Faits « considérablement grossis », d’une part, par les représentants à l’Assemblée représentative dans l’espoir légitime d’obtenir rapidement les crédits publics à la protection du littoral ; et d’autre part, par le service des travaux publics qui voit la possibilité de créer « une nouvelle agglomération de toutes pièces, selon les normes modernes et ce, en rasant la vieille ville ». Ils estiment, en effet, que le coût du transfert serait peut-être moins onéreux que les travaux de protection.
« Vue utopique, tant sur le plan technique que sur le plan psychologique ! Il n’est pas d’exemple d’abandon pur et simple d’une ville. En outre, cette intrusion de la mer coïncidait avec un temps cyclonique accompagné de fortes pluies, et les eaux qui stagnèrent pendant quelques heures en certains points bas, étaient des eaux de pluie et non des eaux de mer ; on n’eut jamais à déplorer le moindre dégât matériel ni, à plus forte raison, aucune victime. » On se demande aujourd’hui qui des représentants de la population ou de l’administration de la ville ont eu raison de s’inquiéter.
En tout cas, les conséquences de l’érosion et de l’affolement public sont lourdes pour Morondava. Tous les chantiers sont pratiquement arrêtés pendant deux ans (1953-1954). De nombreux bâtiments en cours de construction sur les crédits du budget général sont stoppés. La décision de ne plus construire à Morondava est même prise. En particulier, l’érection du wharf est annulée. Or, un marché financé par le Fonds d’investissement pour le développement économique et social, est passé à cet effet avec la Société nationale des Travaux publics. Celle-ci débute son travail par les premières installations, l’arasement d’une dune et l’approvisionnement en pierres. « Le marché fut résilié et le projet du wharf abandonné. »
Toutefois, grâce à la ténacité de la municipalité et des pouvoirs publics provinciaux, la mesure exclusive sur Morondava peut être levée. Le calme revient dans les esprits et « une appréciation plus saine de la situation se fit jour ». Des missions venues de France étudient ce phénomène d’érosion maritime qui n’est pas spécial à Morondava et « qui se manifeste sur de nombreux autres points du globe, sans qu’il soit question pour cela d’abandonner quoi que ce soit ».
La construction de 11 épis perpendiculaires à la côte est préconisée et les travaux menés à bien au cours de l’année 1954, sur le reliquat des crédits du wharf et les fonds du budget général. Au cours des grandes marées de septembre 1954 et de l’hivernage 1955, on n’a plus constaté de phénomènes d’érosion notables et surtout, de plus en plus, la plage s’engraisse sensiblement. Ce qui laisse supposer que les épis jouent effectivement un rôle stabilisateur. « Il est déjà possible d’envisager, pour un avenir proche, la remise en état du boulevard maritime, pour le moment ensablé.»
Parallèlement à cette amélioration, la direction générale des Travaux pratiques revient sur sa décision de stopper toutes constructions à Morondava. Les travaux reprennent partout. « La ville prend un aspect coquet qui ne manque pas d’étonner les visiteurs, dans l’esprit de qui Morondava devait se présenter comme un lieu perdu, aux rues inondées ou boueuses. »
Cette épreuve donne aux représentants élus de la commune, l’occasion de manifester avec éclat leur esprit de cohésion, façonné par vingt ans de vie municipale. Les conseillers offrent, de manière spontanée et à l’unanimité, leur démission dès qu’il est question d’abandonner la ville. Les intervenants auprès de l’Assemblée représentative se multiplient et, finalement, le conseil municipal obtient gain de cause. Ainsi, Morondava est maintenue, les projets antérieurs repris excepté le wharf.
« Il est d’ailleurs probable que la construction du wharf aurait de toute façon été abandonnée; elle n’avait jamais été demandée par les représentants locaux qui estimaient ce projet trop ambitieux pour la région. »
Texte : Pela Ravalitera – Photo : Archives personnelles
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