Notes du passé: La fin du trafic des esclaves à Madagascar

Publié le par Alain GYRE

La fin du trafic des esclaves à Madagascar

27.10.2016 Notes du passé

 

«Son attachement aux habitants et aux manières européennes a, par son exemple, un étonnant effet et à la fin, en augmentant le désir de confort des habitants, complètera l’œuvre de civilisation et ouvrira un nouveau commerce qui se substituera au trafic des esclaves. Ce grand dessein, s’il est poursuivi avec persévérance par le gouvernement de Maurice, sera atteint, n’en doutons pas, et l’ile de Madagascar en prendra sa naturelle importance. » C’est l’un des portraits de Radama fait par un Européen, en l’occurrence Thomas Pye, agent civil anglais à Toamasina.

Dans une lettre adressée à Robert T. Farquhar, gouverneur de Maurice, le 14 juillet 1817, il se vante d’avoir ramené tout le long de la côte Est, « l’ordre et la tranquillité qui avaient été un moment troublés par la peur des naturels et des traitants à la vue de l’immense armée de Radama » avec qui il devra s’entretenir de manière officielle. C’est la veille de cette première entrevue que le Phaeton arrive au port de Toamasina ramenant les deux frères du roi et leur précepteur James Hastie de Maurice (lire précédente Note).

Lors de ce premier entretien avec le jeune roi merina, Thomas Pye lui explique le désir du gouverneur de Maurice de faire de lui le roi de tout Madagascar, pour qu’il ouvre au commerce la totalité de son royaume. Robert Farquhar souhaite aussi qu’il conclue un traité d’amitié avec Jean René, un de ceux qui sont les plus aptes à l’aider dans ce dessein, sans pour autant écorner les droits et l’autorité de ce dernier. « Car en augmentant le pouvoir et l’autorité de Jean René, Radama augmentait la gloire et la considération de sa couronne dans la partie orientale de l’ile et il ne diminuait pas sa dignité en adoptant Jean René comme son père depuis qu’ils étaient tous les deux fils du gouverneur de Maurice. »

Thomas rédige alors un court traité qui est ratifié, selon lui, en présence de l’armée de Radama toute entière, environ 40 000 hommes, au camp de Manangareza près de Toamasina. Après que le roi et Jean René scellent le serment de sang. Le traité stipule que le frère de ce dernier et chef d’Ivondro, Fils, sera installé dans son fief et retrouvera son autorité. Enfin, des arrangements des plus satisfaisants sont faits pour compenser « la présence de cette immense armée qui avait semé la terreur et la famine sur sa route et qui avait fait naitre à Toamasina une panique qu’il est difficile de décrire ».

L’entrée de Radama à Toamasina en grand apparat, la façon dont il reçoit ses frères à la tête de son armée, la signature du traité et son discours aux soldats pour le leur expliquer, selon l’Anglais, « tout cela fut grand et mériterait la plume de l’historien et le crayon de l’artiste.»

Toutefois, l’absolue nécessité d’évacuer aussi rapidement que possible cette armée qui vit sur  une région où elle trouve à grand peine de quoi manger, empêche à l’agent anglais de discuter avec Radama  du sujet le plus important pour Robert Farquhar, la question du trafic des esclaves. « Mais ce dernier ayant maintenant gagné à lui le plus puissant chef de l’intérieur et le plus civilisé des chefs de la côte qui ne peuvent rien lui refuser, ce point est d’ores et déjà acquis. »

Thomas Pye ne cache pas sa surprise de constater le bon ordre et la discipline qui régnait dans l’armée de Radama. Bien que 40 000 hommes aient campé à environ un kilomètre de Toamasina, à court de vivres, aucune denrée même pas l’équivalent d’un sou, n’est volée. Et parmi les soldats qui ont la permission de quitter le camp, il n’en est pas un seul qui ne l’ait regagné après le coucher du soleil.

Radama commande d’un regard cette grande armée, en apparence composée d’irréguliers. Sa garde du corps atteint le plus haut degré de discipline sous le commandement du sergent anglais Brady qui lui sert d’instructeur. « Ce dernier mérite d’ailleurs les plus grandes félicitations pour la façon supérieure dont cette garde effectue les exercices et beaucoup de manœuvres. Elle exécute les feux de salve avec une admirable précision. » L’uniforme des hommes et leur maintien sont aussi impeccables. Leur tenue est constituée d’un turban, une chemise blanche, une tunique, un gilet et des pantalons, un ceinturon de cuir et d’élégantes gibernes argentées ornées de perles. Les auteurs affirment que Radama prend grand plaisir à surveiller leur progrès.

Thomas Pye conclut sa lettre en déclarant qu’il transmet à James Hastie les instructions du gouverneur de Maurice. « Je lui expliquais qu’il devait se considérer comme résident et principal officier du gouvernement de Maurice auprès des Merina et de Madagascar. »

 

Texte : Pela Ravalitera – Photo : Archives personnelles

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J
Bonjour <br /> très intéressante <br /> merci
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