Le Menabe, berceau de la dynastie sakalava

Publié le par Alain GYRE

Le Menabe, berceau de la dynastie sakalava

26.05.2017 Notes du passé

 

Une des grandes divisions du pays sakalava, le Menabe- « dans lequel on a l’habitude d’englober le Fiherenena et le Mailaka » (Régis Rajemisa-Raolison)- est une région d’ancienne civilisation.

Deux versions sont données pour expliquer l’origine du mot Menabe. La première remonterait avant l’époque d’Andriandahifotsy. Un des ancêtres de ce roi, blanc d’origine arabe, aurait apporté en abordant à Toliara (alors Tolimaleva), un superbe taureau rouge appelé Menabe. Il recommande à son fils de suspendre les cornes de l’animal sur sa tombe à sa mort. « C’est depuis ce temps-là que le taureau est devenu pour les Sakalava l’objet d’un culte spécial, égal à celui qu’on rend aux souverains et que cette étendue de pays fut appelé Menabe. »

L’histoire connue du Menabe remonte alors à l’époque d’Andriamandazoala et surtout de son fils Andriamisara. Celui-ci s’établit comme roi du Fiherenana, au bord de la rivière Saint-Vincent. Regardé par les Sakalava comme leur grand ancêtre divinisé après sa mort, Andriamisara est l’objet d’un culte toujours vivace de nos jours. Son fils et successeur sur le trône du Fiherenana, Andriandahifotsy, étend sa puissance jusqu’au fleuve Mangoky. Et par ses nombreuses luttes contre les autochtones de la région, les Antangondrosy, il est regardé comme le vrai fondateur de la dynastie sakalava.

C’est à son époque que l’on place la seconde version de l’origine du mot Menabe, « donné au nouveau pays qu’il a conquis, à la suite de l’immolation d’un bœuf rouge, la veille de la bataille décisive qu’il devait gagner».

Andriandahifotsy a deux fils. L’ainé, Andriamanetiarivo, fondateur de la dynastie Volamena, prend la succession du royaume du Menabe ; le cadet, Andriamandisoarivo, fondateur de la dynastie Maroseranana, va fonder, plus au nord, le royaume du Boeny. À Andriamanetiarivo, succèdent plusieurs rois du Menabe, dont Ramitraho.

D’ascendance hova, ce dernier « est fils du roi Mikala ou Andrian­tsoarivo, descendant des Tantsaha d’Ambohijanaka, retiré chez les Sakalava pour faire fortune à une époque difficile à déterminer ». Désigné par son père pour lui succéder en 1812, Ramitraho a d’abord à lutter contre ses deux frères, Olitasy et Kelisambay. Peu après, il a à soutenir deux expéditions de Radama Ier, en 1820 et 1822. La première est désastreuse pour l’armée merina, la seconde se termine par sa victoire sur les troupes de Ramitraho, le 13 juin 1822, près du village de Mahabo.

Ce succès est consacré par le mariage de Radama avec Rasalimo, la fille du roi Ramitraho, et par un traité aux termes duquel les Hova peuvent commercer librement dans tout le Menabe.

Pour la petite histoire, précisons que « Radama aimait sincèrement Rasalimo ; il en avait eu deux enfants, un garçon, Rabobalahy, et une fille, Raketaka, qu’un parti voulut mettre sur le trône à sa mort en 1828 ». C’est pour Rasalimo que Radama fait construire la Tranovola, Palais d’argent, dans l’enceinte même du Rova d’Antananarivo.

Tenace autant que souple et rusé, Ramitraho ne se tient pas cependant pour vaincu d’une manière définitive. En 1825, il fait molester par ses soldats les colons hova envoyés par Radama dans le Menabe. Il s’ensuit une nouvelle expédition merina la même année. Voyant la supériorité de l’armée hova, « Ramitraho saisit l’occasion d’une escarmouche où l’un de ses neveux fut tué, pour rejeter toute la faute sur son parent et faire un nouveau geste de soumission au roi de Tananarive, auprès duquel il envoie son ambassadeur ».

Mais la rancœur de Ramitraho contre les Merina n’est pas éteinte pour autant et devait éclater après la mort de Radama. Aussitôt, il s’allie avec son frère Kelisambay- qui s’est retiré à Mavohazo, alors qu’Olitasy se rend avec Radama en Imerina- pour attaquer les Merina. Tandis que son frère lynche ces derniers plus au nord, Ramitraho attaque avec ses sujets les colons merina de la région,. « La bataille fut très chaude » et c’est au cours de cette révolte pour l’indépendance de son territoire que Ramitraho trouve la mort en 1834. Selon l’usage sakalava, après sa mort, on lui donne le nom d’Andriamahatantiarivo.

Son fils Rainiasa, « voulant se donner l’allure d’un roi indépendant », 7 000 Hova envahissent à nouveau son pays et le prend. Il se place finalement « sous la protection » de Ranavalona Ire. Un grand nombre de Sakalava vont se réfugier auprès Kelisambay qu’ils élisent roi à Tsizimbongy. Refusant les présents apportés par des ambassadeurs de la reine merina, il déclare de nouveau la guerre à ses troupes qui lui font subir deux attaques. Il repousse sans trop de frais la première, mais à la seconde, on lui oppose 2 000 hommes et son armée est mise en déroute. Kelisambay s’enfuit dans le Fiherenana et y meurt en 1837. À noter que les expéditions successives en pays sakalava, coûtent très cher à la royauté merina.

 

Texte : Pela Ravalitera – Photo : Agence nationale Taratra

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