Notes du passé: Arts traditionnels et immuables imériniens

Publié le par Alain GYRE

Arts traditionnels et immuables imériniens

20.05.2017 Notes du passé

 

Pour les visiteurs d’Antananarivo, certaines productions artistiques locales présentent un côté curieux et typique.

Robert Boudry l’indique dans son « Art et artisanat malgache » : « Celui qui arrive pour la première fois dans la capitale de l’ile rend d’abord visite au marché du Zoma où il admire l’ingéniosité de tout ce qui s’offre à sa vue : oiseaux de corne et sparteries, rabanes et lambamena de soie aux couleurs chatoyantes, objets et statuettes de bois, petites poteries rustiques enduites de graphite, marqueterie, aquarelles… Le plus souvent, il quitte la ville sans avoir vu autre chose que ces objets, plus ou moins commercialisés, qui ne manquent pas cependant de lui plaire. Il serait à vrai dire injustifié de ne juger l’art des Hauts-plateaux que d’après de telles productions,  dont la facture dérive de l’enseignement donné aux ateliers des Arts appliqués malgaches. »

L’amateur d’art et de curiosité, lui, recherchera l’objet ancien comme le meilleur témoignage des capacités artistiques locales. « Les Palais et Musées le lui enseigneront. »

Le bois de lits merina, « que l’on cite particulièrement en exemple quand on parle de l’art malgache », forment des bandeaux d’environ deux mètres de long, de palissandre dur d’un brun rougeâtre et sombre, gravés au trait ou sculptés comme des bas-reliefs. Ils sont apparus à une époque où les influences européennes commençaient à se faire sentir, « mais on doit aisément reconnaitre que les artisans de cette époque, s’ils se sont inspirés d’une technique étrangère, ont atteint l’art véritable ».

Les plus anciens de ces bois de lit remontent à l’époque de Radama Ier. Ils utilisent de nombreux motifs : dessins géométriques imputés en général aux influences arabes ; « rosette » astrale à six branches, « rosacés » solaires, carrés inscrits  représentant la « ziqqurat » babylonienne, « ondes » de la cosmogonie primitive et « arbres de vie » qui dénotent leur lointaine origine chaldéenne, « bien qu’ils aient perdu pour le profane leur signification magique vieille de quatre millénaires ».

On voit aussi sur ces bois de lit, le bœuf, la pintade, les hommes…, mais les plus remarquables qui ne sont pas les plus anciens, sont ceux qui représentent des enfants se rendant à l’école, des files de musiciens, de soldats et de dames de la Cour en robe à cloche portant l’ombrelle, des cavaliers au bicorne empanaché…

Le fer est employé pour la fabrication des chandeliers dont « l’élégance » ne manque pas d’attirer les étrangers. « Une mention spéciale doit être faite aussi de très anciens chandeliers en stéatite, pierre tendre qui durcit à l’air et que la graisse de bœuf brûlée a enduite d’une patine rougeâtre. »

Très recherchées également sont les toges traditionnelles de soie, les « lamba » tissées à la main et « de facture remarquable ». La soie du « landibe » fournit une matière brute assez belle quoique d’une « tonalité assourdie » : d’un gris jaunâtre, elle se teint facilement en rouge sombre et sert à tisser des « lambamena » ou linceuls.

Les toges tissées en « landikely » ou soie naturelle d’Europe, teintes de couleurs vives, sont souvent formées de trois bandes de soie à rayures rouges, vertes ou bleues, la bande centrale étant brodée, avec les extrémités garnies de franges. « Les lambamena comptent parmi les productions les plus agréables à l’œil qu’on puisse trouver ici. » Et « si la technique de la soie et l’usage des rayures paraissent bien avoir une origine asiatique, indonésienne, les dessins géométriques qui les ornent, les broderies et les végétaux stylisés ont des affinités avec l’art du Proche-Orient. »

Cependant, l’évolution artistique se manifeste surtout à Antananarivo dans la peinture, débutant avec l’arrivée des premiers Européens.

Tout d’abord, les peintures murales de la Tranovola dans le Rova royal : « elles ont le charme de certains décors romantiques, mais sont traitées d’une manière exotique. » Les sujets qu’elles utilisent, motifs décoratifs, végétaux, personnages, foules,  créent une atmosphère semblable à celle des bois de lit, « qui est plus l’atmosphère d’une époque que l’expression d’un sentiment purement malgache. Il n’empêche cependant que cette œuvre, malheureusement unique, est originale car l’artiste a su s’inspirer d’une technique sans se laisser asservir par elle. »

Mais c’est à partir de 1930 qu’un mouvement « intéressant », en matière de peinture, se dessine dans la capitale, suscité en grande partie par la venue des boursiers de peinture et de sculpture qui, chaque année, donnent des cours et forment des élèves. Les jeunes artistes s’inspirent de ces maitres, chacun selon ses qualités propres et « le résultat est souvent heureux ».

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Publié dans Histoire, Notes du passé, Arts

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