Antananarivo, une capitale champignon
Antananarivo, une capitale champignon
04.10.2017 Notes du passé

«Le général Gallieni, malgré l’ampleur de ses prévisions, s’est trouvé en défaut » (Vignau, administrateur-maire d’Antananarivo). En 1951, la capitale malgache devient une « ville champignon » dont la croissance est si rapide que toutes les prévisions sont dépassées. « Si le général Gallieni avait pu prévoir l’extension de la ville, il ne l’aurait pas, en 1908, étranglée dans ce collet monstrueux qu’est la voie de chemin de fer du Tananarive-côte Est. Cette ligne et sa gare terminale (de Soarano) sont parmi les plus grands obstacles actuels au développement de la cité, cette dernière occupant la plus belle de nos avenues. »
Cette poussée est alors loin d’être déterminée et l’administrateur-maire Vignau sonne l’alarme pour l’organiser selon un plan d’ensemble. Celui-ci existe déjà et si, en avril 1951, les détails ne sont pas connus, quelques idées générales peuvent être dégagées.
Tout d’abord, la croissance en hauteur type « Manahattan » est exclue. « Ce n’est pas sur les collines déjà surpeuplées et sans espaces libres du vieux Tana que doit se faire, par une poussée verticale, la croissance de la ville; bien au contraire, par une expansion en surface dans les vallées limitrophes ou par une projection de cités satellites sur les coteaux voisins. » La place ne manque pas, ni les moyens de communication.
En outre, les difficultés d’établissement sur des terrains marécageux et la rizière ne sont pas à prendre en considération. « Non seulement de nombreuses villes du Sud-est asiatique sont tracées dans les marécages, mais à Tananarive même de nombreux terrains ont déjà conquis la rizière. » Toutefois, cette expansion en surface doit être orientée car jusque-là, les constructions ont poussé de façon anarchique; il n’y a eu aucun plan à opposer aux propriétaires.
Le plan prévoit également des zones résidentielles, des espaces libres; il délimite une zone industrielle car même dans la banlieue, l’installation d’usines ou d’établissements industriels n’importe où, ne peut être tolérée. « Ce qui est suburbain aujourd’hui, sera urbain demain. »
Autres principes généraux: « Ne pas céder à la tentation facile des grands immeubles collectifs; ne pas lésiner sur les espaces libres; voir grand dans le tracé des voies publiques… » Et surtout, les travaux d’assainissement (adduction d’eau douce, égouts…) des zones prévues au plan d’extension « doivent être exécutés à l’avance ».
En effet, déjà il y a à dire sur le système d’égouts de la capitale. Il est constitué d’un unique système d’évacuation composé de caniveaux, de canaux à ciel ouvert, de buses, d’égouts semi-visitables ou visitables, dont l’implantation n’a fait l’objet d’aucun plan d’ensemble et qui est disposé et raccordé « de façon empirique ». De surcroît, il est loin de desservir convenablement la totalité de l’agglomération.
Ainsi pour les immeubles à construire, s’il n’est plus admis en 1951 d’autres systèmes que la fosse septique, la plupart des maisons existantes ne possèdent que des fosses fixes plus ou moins étanches, voire des fosses perdues ou des tinettes. « Les matières fécales de vidange sont, après enlèvement, déversées dans l’Ikopa en aval de la ville! »
Autrement dit, tout reste à faire dans ce domaine. À l’époque, il coûterait quelque un milliard pour réaliser un tout-à-l’égout avec épuration biologique consécutive dans trois stations d’épuration situées à la pointe sud sur l’Ikopa, et à la pointe nord-est sur le canal de la Manjakaray.
« L’application d’un tel système n’irait pas sans difficulté, mais il est en tout cas indispensable qu’il soit incorporé au plan d’urbanisme des futurs quartiers ou cités satellites. »
Texte : Pela Ravalitera - Photo : Archives personnelles
http://www.lexpressmada.com/blog/notes-du-passe/antananarivo-une-capitale-champignon/