Conte: Karijavola et Trimobe
Karijavola et Trimobe
Tiré des « Angano malagasy nofohazina » de Moks Razafindramiandra
Il était une fois, selon un conte recueilli dans l'Ouest de Madagascar, une femme enceinte qui avait une envie excessive de taro. « Je vais perdre mon enfant, si je ne mange pas de taro », dit-elle à son mari. Celui-ci répondit : « Seul Trimobe cultive du taro par ici, va donc lui en demander. » Cependant, Trimobe n’était pas un homme mais un monstre.
La femme pria Trimobe de lui vendre du taro. Trimobe refusa de vendre mais lui demanda en échange son premier enfant. La femme ayant accepté sans penser à ce qu'elle faisait, Trimobe lui dit d’aller chercher une corbeille et de déterrer autant de taro qu’elle pourrait manger.
Elle se servit ainsi à volonté jusqu’à son accouchement. Trois mois plus tard , Trimobe vint chercher l’enfant. Mais la femme lui dit : « Il est encore trop petit et sans goût, si vous le mangez maintenant. Laissez-le grandir un peu et devenir plus gras ». « Cela est vrai », dit Trimobe.
La femme cacha l’enfant chez des parents, lorsque Trimobe fut parti. Pourtant, un jour, Trimobe le surprit à la maison, car il était venu voir sa mère qui lui manquait. « Je vais emmener l’enfant », dit Trimobe, « parce que cela fait longtemps que vous l’avez élevé. D’ailleurs, il est maintenant bien gras. »
“Je ne voudrais pas que vous mangiez mon enfant, mais comme j'avais accepté de vous le donner , je dois m'y plier. Cependant, pour éviter que les gens se moquent de moi et me blâment, voici ce qu’on va faire : je l’enverrai garder les bœufs et c’est là que vous irez le prendre. Il s’appelle
Karijavola ». « Cela est juste », dit Trimobe.
Mais Karijavola avait entendu cette conversation entre Trimobe et sa mère, si bien qu’il dit à ses amis : « Je propose que nous allions tous nous appeler Karijavola, pour échapper à Trimobe , quand il viendra nous interroger. » Tous ses amis acceptèrent la proposition de Karijavola.
Trimobe vint effectivement aux champs. Lorsqu' il demanda aux enfants :« Lequel d’entre vous s’appelle Karijavola ? », celui-ci répondit : « Lui s’appelle Karijavola, celui-là s’appelle Karijavola, cet autre s’appelle Karijavola. Nous nous appelons tous Karijavola, alors de qui avez-vous besoin ? » « Cette femme a joué au malin avec moi », dit Trimobe. Et il rentra au village.
« Retournez dans les champs demain, je lui ferai porter un pagne rouge », dit la femme, lorsque Trimobe revint la voir. Mais Karijavola demanda à tous ses amis de porter un pagne rouge, si bien que Trimobe ne sut lequel emporter. Il avait peur de manger l’enfant d’une autre. Il en fut ainsi un moment: Karijavola veillait à ce que ses amis aient tout objet que sa mère lui donnait.
Cependant, un jour, Trimobe refusa de se laisser faire plus longtemps et tenta de manger la mère même de Karijavola. La mère implora son pardon et lui dit de revenir au cours de la nuit, au moment où les gens dormaient profondément. Trimobe ne refusa pas la proposition.
La nuit venue, Trimobe s’approcha doucement de l’enfant qui dormait profondément et réussit à l’emporter. L’enfant se plaignait amèrement quand il se réveilla : « Je vais mourir, Maman ! Je vais mourir, Maman ! » « Hélas, je ne peux rien faire“, dit sa mère. On t’a échangé contre du taro, essaie par tous les moyens de sauver ta vie ».
Une fois chez lui, Trimobe fit chauffer de l’eau pour faire cuire Karijavola. Cependant, au moment où il allait voir où en était l’eau, Karijavola lui fit un croc-en-jambe et Trimobe tomba la tête la première dans la grosse marmite pleine d’eau bouillante, et y mourut.
Karijavola rentra à la maison après la mort de Trimobe. Lui et ses parents étaient sauvés. Ceux-ci organisèrent une grande fête à laquelle ils invitèrent les amis de Karijavola et les habitants du village.
Contes, contes, légendes, légendes!
Moi, je raconte, vous, vous écoutez!
Texte : Jacques Randrianaivo, Images : Roddy
https://madagasikara-namako.jimdo.com/francais/les-livres-d-enfants/12-karijavola/