Le paradoxe du secteur minier
Le paradoxe du secteur minier
APOI 28 mars 2018

Madagascar est réputée disposer de ressources minières variées et abondantes comme cela vient d’être rappelé à l’occasion d’un forum économique qui s’est tenu à l’hôtel Carlton. Depuis quelques années de grandes compagnies minières ont réalisé des investissements extrêmement conséquents. Cependant, l’exploitation des ressources minières ne semble que peu contribuer au développement du pays. Le rapport de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE) de l’année 2014 indique que le secteur extractif représentait 4% du PIB.
Des richesses largement sous-exploitées
« Le secteur minier fait l’objet de nombreux préjugés » explique Willy Ranjatoelina, Secrétaire Exécutif de la Chambre des Mines de Madagascar. « Le pays est certes riche en ressources minérales, mais elles restent largement sous-exploitées. Il n’y a que 5 minerais exploités à l’échelle industrielle (chromite, graphite, ilmenite, nickel et cobalt). L’or, les pierres précieuses et semi-précieuses sont produits à l’échelle artisanale. Sur les 200 blocs pétroliers disponibles, moins de 20 sont explorés. La contribution du secteur minier au PIB reste faible. Pour être un pays minier, Madagascar doit tirer au moins 20% de son PIB du secteur extractif. Cette situation est due à la sous-exploration des richesses minières. Très peu de gisements sont confirmés par des sondages. En outre, à cause des crises cycliques, perçues comme des risques élevés, le pays perd en attractivité et en compétitivité ». Pour Willy Ranjatoelina, affirmer que Madagascar n’a pas besoin d’investisseurs étrangers, comme on l’entend parfois, est déplacé. Les investissements miniers sont capitalistiques à l’instar de QMM avec 931 millions USD et 8 milliards USD pour Ambatovy. Les entreprises minières ne font pas que spéculer et la cession de permis miniers entre les investisseurs, souvent décriée, est une pratique courante et internationale. Investir à Madagascar coûte, en outre, 30% plus cher que dans les pays concurrents à cause de l’insuffisance des infrastructures. Il est donc primordial de garantir un encadrement juridique et fiscal qui préserve la rentabilité des investissements. Pour le Secrétaire Exécutif de la Chambre des Mines de Madagascar, « afin que le secteur minier devienne un levier de développement, il est nécessaire de promouvoir l’exploration, de rétablir les attributions du BCMM en matière de gestion des permis miniers et de préserver la compétitivité et la stabilité du cadre légal et fiscal « .
L’informel menace l’environnement
Le secteur minier est fortement dominé par les petits exploitants informels. Ces derniers, qui échappent à tous contrôles, « détournent » des recettes de l’ordre de 700 millions d’USD selon les estimations de la société civile. D’autre part, la ruée vers les petites mines entraîne des dommages considérables sur l’environnement. L’Office National pour l’Environnement (ONE), entité qui délivre les permis environnementaux, ne possède pas de budget de fonctionnement. Pour Serge Zafimahova, membre de la société civile, il est indispensable d’assurer son indépendance financière. L’ONE ne figure pas dans la liste des bénéficiaires des différentes redevances minières. Ses ressources proviennent généralement des grands exploitants qui demandent des permis environnementaux. Ce n’est qu’en bénéficiant d’une autonomie financière que l’Office pourra vérifier les engagements en matière d’impacts environnementaux.
En résumé, si le secteur minier impacte relativement peu l’économie formelle malgache, malgré quelques énormes investissements, il contribue largement, à cause d’un manque de contrôle du secteur informel, à la dégradation de l’environnement.
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