Conte: Le bœuf d’eau

Le bœuf d’eau
Conte Antankarana
Recueilli à Voliemar [province de Vohemar).
Trois sœurs allèrent, dit-on, se promener au bord de l’eau et trouvèrent trois œufs de tsiketrika.
L’aînée dit : « Je ferai cuire le mien. »
La seconde dit : e Je ferai couver le mien par une poule. »
La dernière dit ; « Je plongerai le mien dans un étang. »
A ces mots les deux aînées se moquèrent de leur cadette.
Faravavy pourtant plongea son œuf dans l'eau : au bout de plusieurs jours il était éclos.
Faravavy vint au bord de l’étang et appela le poussin en ces termes :
« Œuf de tsiketrika! Œuf de tsiketrika ! je te regrette maintenant ! Viens auprès de moi. »
Et l'ètre sortit de l’eau et devint une grosse poule.
Faravavy, très contente, la caressa, puis la laissa retourner dans l’étang.
Le lendemain elle appela de nouveau, et l’être sortit encore de l’eau, mais au lieu d’une poule, c’était un gros bœuf.
Fara- vavy fut toute joyeuse, et tous les jours elle revenait voir son bœuf.
Mais ses parents se demandèrent où pouvait bien aller leur fille.
Ils suivirent sa trace, écoutèrent comment elle appelait, et virent l’être qui sortait de l’eau à sa voix.
Ils résolurent de tromper Faravavy.
Lorsqu’elle fut de retour à la maison, ils lui dirent ;
«Ta sœur est bien malade, il faut que tu ailles la voir. »
Faravavy partie, ses parents se rendirent au bord de l'étang, et appelèrent le gros bœuf comme faisait leur fille.
Le mari appela le premier et dit ; « Œuf de tsiketrika! (Euf de tsiketrika ! »
Mais le bœuf ne bougeait pas, car ce n’était pas la voix de Faravavy.
La femme appela aussi, mais sans plus de succès.
Enfin ils firent appeler Faniviovo, et aussitôt le bœuf sortit de l’eau, car la voix de cette fille ressemblait à celle de Faravavy.
Dès que le bœuf fut à terre, les parents de Faravavy l’attachèrent avec des cordes puis le tuèrent.
Au bout de quelque temps Faravavy revint.
Elle salua ses parents; ensuite elle se rendit à l’étang où demeurait son bœuf et l’appela comme d'habitude, mais rien ne se montrait. Elle retourna à la maison, et, de tristesse ne voulut plus manger.
Et quand elle vit dans la cour les restes de son être, elle alla de nouveau au bord de l’étang et elle
chanta :
« Sable, sable 1 Avale-moi, car mon père et ma mère ne m’aiment pas! »
Le sable s’entrouvrit et avala Faravavy.
De là viennent les êtres qui demeurent dans l’eau.
Contes de Madagascar
Charles RENEL