Conte: La petite machine étonnante

La petite machine étonnante
Il y avait une fois un homme dans une misère sans fond. Mais c’était un homme courageux, il voulait en sortir et savait demander des conseils pour trouver enfin de quoi faire vivre sa famille.
Un jour, il rencontre une connaissance : ils parlent de la misère des temps :
- Dis-moi, donne-moi donc une idée pour que je trouve de quoi vivre…
- Mon vieux, ce n’est pas facile.je ne vois vraiment pas quel conseil te donner. Gagner sa vie en ce moment, ce n’est pas une petite affaire !
Il ne se décourage pas notre gars…Il va voir un de ses copains ;
- Ah ! mon vieux, donne-moi donc une idée pour que je puisse gagner ma vie !
- Mon vieux, si je le savais, je te la dirai tout de suite, mais je ne vois vraiment pas…
Il continue ses questions avec un troisième copain de son village :
- donne-moi donc une idée pour gagner ma vie… Tu te rends compte, je ne peux même pas norrir ma femme et mes gosses !
- Ah, «écoute… Je connais bien un moyen qui te sortirait d’affaire… Oui… Mais je ne sais pas si tu pourras faire ce qu’il faut pour ça… Si tu y arrivais, tu serais tiré d’affaire… Mais c’est une chose sacrément dure…
- Ah, mon vieux ! N’hésite pas ! dis-moi tout ce qu’il faut faire. Difficile ou pas, même si c’est très difficile, il faut que j’y arrive. Ça ne peut plus durer.
- Alors, tu crois que je peux te dire quoi faire ? Tu es prêt ?
- Oui alors, tu peux en être sûr…
Voyons donc les conseils que son copain lui donne :
- Bon, écoute-moi bien, je vais t’indiquer une chose qui peut te sauver, mais elle n’est pas facile. Il te faut aller loin. Il faut que tu ailles dans la forêt. En pleine forêt. Il te faudra bien une semaine avant d’arriver là-bas. Tu seras fatigué, mon vieux, tu peux m’en croire ! Mais ce n’est encore rien… Arrivé là-bas, on va te faire souffrir, et comment ! Si tu ne peux pas t’expliquer sur ta venue, tu vas en attraper… On pourrait même te tuer, tu ne serais pas le premier !
- Ah mon vieux ! Comment ! Explique-moi un peu mieux ton affaire…
- Bon ! Voilà ! Quand tu auras marché dans la forêt toute une semaine et que tu seras au cœur de la forêt, tu verras une caverne avec une porte. C’est la caverne d’un Kakabe, le monstre maître de la forêt. Tu frappes à la porte…
- Je frappe à la porte de ce Kakabe ?
- Mais oui, je te dis… (Le Kakabete te fera entrer. Il te demandera ce que tu viens faire. Tu le lui expliqueras. Il ne te croira pas et il va te torturer pour savoir la vérité. Toi, tu dois te taire. Toujours ! Si tu cries, si tu pleures, si tu te plains seulement… Il te tuera… Alors, réfléchis, et fais bien attention. Si tu supportes tout, le Kakabe te donnera sûrement quelque chose qui t’aidera à vivre et même à être riche…)
(Que faire ? Vivre dans la misère sans fond ou essayer de s’en sortit ?)
Notre pauvre homme choisit de partir. Il quitte son village et sa famille, il marche des heures dans la forêt ; des jours entiers. Toute une semaine ! Au bout de huit jours, il arrive près d’une caverne. La caverne que son copain lui a indiquée. C’est la caverne de Kakabe…On l’appelait Monsieur-Longue-Queue. C’était son vrai nom (Mais dans cette histoire, on l’appellera Kakabe :c’est plus simple…). Kakabe était le maître de la forêt, c’était un monstre, pas un homme. Notre homme frappe à,la,porte de Kakabe. Kakabe ouvre.
- Qui es-tu, toi ?
- Moi, je suis moi…
- D’où viens-tu ?
- Oh, je viens de là-bas, un village, hors de la forêt…
- Et qu’est-ce que tu viens faire ici ?
- Ah ! Je suis malade. Malade de famine ! alors je suis venu ici…
- Qu’est-ce que tu racontes-là ?
- Oui, je te dis la vérité. Nous souffrons trop de la famine, ma femme et mes gosses. Nous n’avons rien pour vivre, la famine nous tue. Ici, on m’a dit, y a moyen d’avoir des machins… des choses… pour qu’on ait de quoi vivre… Alors…
- C’est pour ça que tu es venu ici ?
- Mais oui, c’est pour ça seulement…
- Bon ! Entre !
Il entre dans la caverne de Kakabe. A peine est-il entré, on se jette sur lui et on l’attache solidement avec des cordes. Puis on le questionne de nouveau sur la raison de sa venue chez Kakarabe. On voit bien que Kakarabe n’a pas confiance en lui.
- Qu’est-ce que tu viens faire ici ?
- Mais, je vous l’ai dit… Je suis malade de famine… On meurt tous de faim chez nous… Ici, on m’a dit, vous avez des machins, des choses pour vaincre la famine…
Toujours bien attaché, on le porte sur la claie de bois au-dessus du feu (Vous savez bien. La claie où l’on fait sécher ou fumer la viande et le poisson…).
Le voilà sur la claie. Il y a encore du feu et on rajoute du bois pour le brûler.
- Qu’est-ce que tu viens faire ici, toi ?
- Je vous l’ai déjà dit… C’est la vérité… on est malade de famine chez nous. On m’a dit qu’ici, on pouvait trouver des machins ou des choses pour vaincre la famine. C’est pour ça, pour ça seulement, que je suis venu chez vous ? (Ça brûle… le gars souffle… Mais il ne bronche pas). Pendant longtemps, on lui fait subir toutes sortes de tortures. Il supporte tout. Pas une plainte ne sort de sa bouche. Pas une ! Heureusement pour lui. S’il avait seulement dit « Aie…Aie… Arrêter ! », on l’aurait tué sans rémission ! Combien d’autres étaient venus chercher le salut chez Kakarabé ? Ils n’avaient trouvé que la mort ! Pour une plainte ou un cri qui leur avait échappé ! Mais lui, il est muet, calme : il souffre en silence toutes les souffrances qu’on lui fait. Ça dure longtemps. On le fait souffrir… Il se tait… On le fait souffrir… Pas une plainte ! Alors, on le détache… Il est libre ! Kakabe lui donne une espèce d’assiette en fer… Mais c’était un précieux cadeau !
- Ça, dit Kakabe, c’est un cadeau pour toi. Tu as souffert en silence toutes les tortures qu’on t »a fait subir… (Tu es courageux, tu mérites de sortir de la misère. Tu seras riche…). Ce que je te donne là, c’est la source de ta richesse. C’est une petite assiette de fer. Une simple assiette, et pas belle encore… Mais c’est une richesse ! Ç’est un talisman ! Voilà comment tu peux faire avec : tu lui donneras des ordres au nom de Kakabe… Comme ça tu diras :
Toi, la petite machine étonnante,
Que voilà !
Toi, le cadeau de Monsieur-Longue-Queue…
Donne-moi…
Tout ce que tu voudras, tout ce que tu désireras…Ordonne-le à la machine. Elle te le donnera. N’importe quoi…Si on lui ordonne de te le donner, elle le donnera…
- Comme ça ? C’est une affaire !
- C’est comme je te le dis !
- Bon ! Je peux faire un essai ?
- Oui, fais un essai, tu verras…
Le gars fait donc un essai avec sa petite machine :
Toi, la petite machine étonnante,
Que voilà !
Toi, le cadeau de Monsieur-Longue-Queue…
Donne-moi du riz à manger…
Car j’ai faim, moi !
Miracle ! La machine obéit et fait sortir du riz en quantité, tout cuit et tout assaisonné !
- Quand tu veux faire arrêter la machine, dit Kakabe, il faut dire : Tombobariko-Balilo…
- Ça va, j’ai compris , dit le gars.
Et il fait arrêter la petite machine : Tombobariko-Balilo. La machine s’arrête aussitôt. Tout heureux, il regarde sa machine…
- Eh bien ! Oui ! Je suis sauvé ! Je vous remercie, vous autres. Je n’ai pas perdu mon temps. Merci beaucoup. Si je n’étais pas venu ici, je serais toujours dans la misère. Je sais que beaucoup de gens sont venus ici chercher leur salut, mais ils ont trouvé la mort. Ça ne m’a pas découragé, et je suis venu. Et j’ai gagné !
Oui, il avait gagné. Il quitte la caverne avec sa petite machine. Il retourne chez lui. Il marche… Il marche des heures… Il marche des jours… Il marche toute une semaine… Il dort dans la forêt toutes les nuits. Quand il a faim, il ordonne à la petite machine de lui donner à manger : elle lui donne à manger. Il arrive chez lui. Il voit sa femme et ses enfants. Il se repose un moment… Comme ils sont tous maigres et pâles, tout chiffonnés ! C’est la famine pour eux ! Ils n’ont presque rien mangé durant son voyage… Pauvres enfants ! Tous les enfants qui souffrent de la faim sont comme ça ! Sa femme l’interroge sur son voyage :
- Alors ? Tu as trouvé de quoi vivre là-bas ?
- Oui, j’ai trouvé…
- Ah bon ! Et c’est vraiment quelque chose de bien ?
- Oui !
- Qu’est-ce que c’est que tu nous ramènes ?
- Regarde !
Et il montre la petite assiette de fer…
- Quoi ! Une assiette de fer ? Qu’est-ce qu’on va pouvoir en faire ?
- Attends un peu ! Attends ! Tu vas voir ce qu’elle est capable de faire, cette petite assiette !
- Quoi ! Assez ! Qu’est-ce que ça va donner cette espèce d’assiette ? Aller se faire souffrir si loin pour un truc comme ça ? Une malheureuse assiette mal fichue ! Ce dont nous avons besoin, c’est de manger ! Elle va nous donner à manger, cette assiette ?
- Bon ! Tu vas voir tout de suite… Tu vas voir ce qu’elle peut faire, cette assiette-là ! Première chose, il nous faut une maison digne de ce nom. Notre maison est pourrie… Une ruine ! Regarde, ma femme ;
Toi, la petite machine étonnante,
Que voilà !
Toi, le cadeau de Monsieur-Longue-Queue…
Où nous vivrons dans la paix…
A peine prononcées les paroles requises, la voilà debout la maison ! Une grande maison… Non, deux ! comme le veut l’habitude : la maison d’habitation et la cuisine . la maison est là, sortie d’on ne sait où ! Deux maisons !
Tombobariko-Balilo…
La machine s’arrête.
- Ah là là ! Ah là là ! eh bien ! C’est une sacrée machine !
La femme est toute retournée !
- Et maintenant la machine… On n’a rien à manger ici… Qu’est-ce qu’elle peut faire, ta machine ?
- Toi alors ! Qu’est-ce que tu es impatiente, toi ! N’aie pas peur, je vais vous faire sortir tout ce qu’il nous faut pour vivre…
Alors il ordonne à la machine de leur donner à manger. Un bon repas ! Ils mangent, l’homme et la femme, et les enfants : ils sont rassasiés ! Ça faisait longtemps…
- Ah, fit la femme, il y a longtemps que je veux avoir des poules et des oies, et des canards… Qu’est-ce qu’elle peut faire, ta machine, pour ça ?
- Ah, toi ! On peut dire que tu es difficile ! Difficile à contenter … Difficile à vivre ! Tout ce que tu veux avoir, demande-le, tu l’auras !
En peu de temps, tous les biens que les riches peuvent avoir, ils les eurent : la petite machine leur donnait tout ce qu’ils pouvaient désirer… Tout ça se voyait. Le village s’étonnait…
- Vous avez vu ? Le pauvre misérable que nous avions au village, voilà-t-y pas qu’il est devenu riche ?
- Ah oui ! Alors ! Ce sont des richards, maintenant…
- Comment ça se fait ? C’est pas clair cette histoire… (Des fois qu’il y aurait de la sorcellerie dans tout ça… !)
- Va savoir !
Un jour le Chef de village rassemble les notables.
- Si je vous réunis aujourd’hui, c’est qu’il y a une raison, une seule : c’est cette chose étonnante qui se passe au bout du village. Le pauvre bougre qui vivait dans la misère, on dirait qu’il est devenu riche ! Il faut voir ça de près. Mais on n’a pas besoin d’y aller tous pour voir ce qui se passe. Je pense que nos adjoints suffiront…
Ils vont donc rendre visite à l’ancien pauvre, le Chef et ceux qui partagent l’autorité avec lui. Ils arrivent à la maison encore toute brillante de neuf.
- Oh ! Vous autres de la maison ! On peut entrer ?
- Mais oui ! Entrez donc !
Les notables regardaient partout : quelle belle maison… Au village, il n’y en a pas de pareille. On entre. On fait les salutations d’usage. Puis le Chef du village parle ;
-Si on vient vous voir aujourd’hui, ce n’est pas qu’il y ait une raison grave, non… Mais on est étonné dans le village de voir cette belle maison et tout ce que vous avez maintenant. C’est pour ça qu’on vient… Quand on vit ensemble, il faut que tout soit clair. Autrefois, il n’y a pas si longtemps, on sait que vous étiez vraiment dans la misère. Comment avez-vous donc eu toutes les richesses que nous voyons de os yeux maintenant ?
Le villageois qui avait conseillé le gars dans la misère autrefois, celui qui lui avait dit comment aller chez Kakabe dans la forêt, était là aussi, parmi les notables.
Le gars devenu riche prit la parole:
- Oui, vous avez raison, c’est une chose étonnante qui m’est arrivée…Mais ce qui m’a sauvé de la misère et de la faim, ce qui m’a apporté la richesse, ce n’est qu’un conseil qu’on m’a donné. Et celui qui m’a donné le conseil qui m’a sauvé, c’est l’un d’entre vous. Il m’a conseillé, d’aller dans la forêt, chez Kakabe… Au fin fond de la forêt. J’ai marché toute une semaine avant d’arriver là-bas. C’est un bon conseil qu’on m’a donné-là. Et celui qui me l’a donné, c’est lui, le chef qui est là. Lui-même. Là-bas, je peux dire, que j’ai fameusement souffert… On m’en a fait voir de drôles… Mais il m’avait prévenu… J’ai tenu le coup : je n’ai fait ni un soupir ni une plainte… J’ai pu supporter toutes les misères qu’on m’a fait subir ! Eh bien ! Après, j’en ai ramassé un paquet…
- Et alors, dit le Chef de village, qu’est-ce que tu as ramené de là-bas ?
- Rien que cette petite assiette en fer… Voilà ce que j’ai eu là-bas ! Rien d’autre ! Ça ne paye pas de mine hein ! Mais toutes les tortures qu’ils ont inventées, j’ai pu les supporter. Je n’en suis pas mort et j’ai pu rentrer chez moi !
- Et cette petite assiette de fer, à quoi elle te sert ?
- Ah ça ! Vous allez voir vous-même… Si je lui donne l’ordre de me donner quelque chose, n’importe quoi, elle me le donne…
Toi, la petite machine étonnante,
Que voilà !
Toi, le cadeau de Monsieur-Longue-Queue…
Donne-nous… du rhum !
A peine avait-il parlé que des bouteilles de rhum apparaissent devant eux…
Tombobariko-Balilo !
Tout s’arrête. La stupeur se peignait sur tous les visages : une chose sans valeur comme ça, qui apportait de si bonnes choses ! (Mais ils applaudirent tous !).
- Vrai de vrai, il a gagné le gars ! Elle en sort des choses cette assiette mal fichue !
(On boit. On boit bien. On se félicite. Une petite fête quoi !).
Dans le village, tout le monde les envie : ils ont des poules, des canards, des oies en quantité… Dans tout le village, il n’y en a pas : la maladie, les éperviers… Alors, on vient les voir. On vient emprunter la petite machine. Il s étaient de bons voisins, ces nouveaux riches, ils la prêtent volontiers dans le même village, il faut s’entraider. C’est bon que tout le monde s’enrichisse un peu. (En peu de temps, tout le monde eut une basse-cour pleine de volailles).
, on lui rapporte sa machine :
- Ah, Chef, dit le gars, tu peux la prendre, ce n’est pas que la mienne, elle est à nous tous. Prends –la seulement… Voici ce que tu diras pour lui faire donner ce que tu voudras avoir :
Toi, la petite machine étonnante,
Que voilà !
Toi, le cadeau de Monsieur-Longue-Queue…
Donne-nous…
Tout ce que tu veux avoir, tu lui demandes… Tu l’auras. Et pour l’arrêter, tu diras :
Tombobariko-Balilo !
La rizière était assez loin du village ; ils emmenèrent la petite machine là-bas. On lui ordonna de donner le riz du petit déjeuner, celui qu’on fait cuire avec beaucoup d’eau et qu’on mange avec du sucre…
Toi, la petite machine étonnante,
Que voilà !
Toi, le cadeau de Monsieur-Longue-Queue…
Donne-nous le riz du petit déjeuner…
En un clin d’œil, le riz sucré remplit les plats, les assiettes… Mais ça déborde ! il faut arrêter la machine ! Mais comment l’arrêter ? On a oublié le mot-clef ! Nn en essaye un autre :
Caramba-Million !
Le riz continue à déborder…
Caramba-Million !
Peine perdue, ça ne s’arrête pas. Le riz coule dans rizières, dans les carrés de terre entourés de diguettes : c’est une vraie inondation de riz !
- Eh ! Allez appeler le gars de cette sale petite machine… On court… On cherche. Le gars n’est pas là ! Et le riz déborde toujours ! Le gars est dans ses plantations. On le trouve… Heureusement ça peut se commander à distance :
Tombobariko-Balilo…
Le gars crie tant qu’il peut. Et la machine s’arrête. Mais les rizières sont couvertes de riz sucré ! Le soir, on lui rapporte sa machine : ils n’en avaient plus besoin, elle avait fait son travail. Les travailleurs avaient eu leur content de manger.
Un autre jour, des gens des environs de chez eux viennent aussi emprunter la petite machine. De quoi avaient-ils besoin ? De blaireaux ! Oui de blaireaux ! Il n’y en avait plus dans leurs terrains de chasse (ils veulent les repeupler de blaireaux...). Ils emmènent la machine . ils donnent leurs ordres :
Toi, la petite machine étonnante,
Que voilà !
Toi, le cadeau de Monsieur-Longue-Queue…
Donne-nous des blaireaux !
Et la machine donne des blaireaux. Ils sortent d’on ne sait où. Mais ils sortent par dizaines, par centaines, par milliers. La forêt en est plein. Ça suffit ! Oui, ça suffit ! Mais comment arrêter la machine ? Ils ont oublié le mot-clef !
Caramba-Million !
Qu’est-ce que c’est ? Ce n’est pas le mot !
Caramba-Million !
Et non, rien ! Ce n’est pas le mot ! Rien à faire : les blaireaux sortent toujours, ils se piétinent. Heureusement pour eux… Le créateur fait bien les choses, le gars de la petite machine passe par là…
- Eh ! dis-donc ! Ta machine ne veut pas s’arrêter !
- Comment vous dîtes pour l’arrêter ?
- Eh… on dit Caramba-Million…
- C’est pas ça-a-a ! Ça ne l’arrête pas…
- Tombobariko-Balilo…
Elle s’arrête. Les gens en restent pantois…
Un autre jour, des gens des environs de chez eux viennent aussi emprunter la petite machine. De quoi avaient-ils besoin ? De blaireaux ! Oui de blaireaux ! Il n’y en avait plus dans leurs terrains de chasse (ils veulent les repeupler de blaireaux...). Ils emmènent la machine . ils donnent leurs ordres :
Toi, la petite machine étonnante,
Que voilà !
Toi, le cadeau de Monsieur-Longue-Queue…
Donne-nous des blaireaux !
Et la machine donne des blaireaux. Ils sortent d’on ne sait où. Mais ils sortent par dizaines, par centaines, par milliers. La forêt en est plein. Ça suffit ! Oui, ça suffit ! Mais comment arrêter la machine ? Ils ont oublié le mot-clef !
Caramba-Million !
Qu’est-ce que c’est ? Ce n’est pas le mot !
Caramba-Million !
Et non, rien ! Ce n’est pas le mot ! Rien à faire : les blaireaux sortent toujours, ils se piétinent. Heureusement pour eux… Le créateur fait bien les choses, le gars de la petite machine passe par là…
- Eh ! dis-donc ! Ta machine ne veut pas s’arrêter !
- Comment vous dîtes pour l’arrêter ?
- Eh… on dit Caramba-Million…
- C’est pas ça-a-a ! Ça ne l’arrête pas…
- Tombobariko-Balilo…
Elle s’arrête. Les gens en restent pantois…
La renommée de cette machine ne faisait que s’étendre… Voilà qu’un jour, des gens de l’autre côté de la mer en entendirent parler. Chez eux, il n’y avait pas de sel. Ils étaient obligés d’aller chercher très loin. Ils vinrent en bateau pour emprunter la machine et lui faire donner du sel en quantité. Leur bateau était parmi les plus grands qu’on puisse voir. Ils arrivent. Ils cherchent la maison du gars patron de la machine. Ils entrent dans la maison.
- Bonjour ! Quel palabre vous amène ?
- Oh ! Il n’y a pas de palabre… On est venu vous voir… On a entendu parler de votre célèbre petite machine qui peut donner tout ce qu’on lui demande… Chez nous, il n’y a pas de sel ; votre machine pourrait nous en donner. C’est la raison de notre visite : on voudrait vous emprunter votre machine pour avoir le sel qui nous manque…
- Si c’est comme ça, dit le gars de la machine, on n’est pas avare ici… Quand vous aurez eu ce que vous cherchez, rapportez-nous la machine, s’il vous plaît…
- N’ayez pas peur, dès que nous aurons eu le sel dont nous avons besoin, nous vous rapporterons la machine.
- On a confiance en vous, mais c’est une chose précieuse, n’oubliez !
- Comptez sur nous…
On fit un accord par écrit avec ces étrangers. Dès le lendemain, au petit jour, le bateau appareille et ils partent avec la petite machine. C’était loin chez eux. Le bateau vogue des jours et des nuits, des semaines entières. Ils arrivent enfin chez eux. Alors qu’ils ne sont plus qu’à dix kilomètres de chez eux, ils prennent la machine et lui ordonnent de sortir du sel :
Toi, la petite machine étonnante,
Que voilà !
Toi, le cadeau de Monsieur-Longue-Queue…
Donne du sel…
Le sel sort et sort encore. Il s’amoncelle : on en remplit des sacs et des sacs. Le sel sort encore. Le bateau est bientôt plein.
C’est assez. Arrêtez ! Mais comment l’arrêter, cette machine, ils ont oublié le mot-clef… Comment l’arrêter, cette machine ? Quelqu’un tente un mot-clef :
Caramba-Million !
La machine continue à sortir son sel !
Caramba-Million !
Caramba-Million !
Rien à faire. Ils en perdent la tête dans ce bateau : il s’enfonce dangereusement sous le poids du sel… Le sel déborde et tombe à la mer. Le bateau va couler ! Tant pis, il faut sauver le bateau… ils jettent à la mer la petite machine : elle tombe au fond de la mer.
Et voilà pourquoi la mer est salée ! La machine est toujours là au fond de la mer. Elle continue à donner du sel toujours et toujours.
Si vous allez vous promener au bord de la mer… Si jamais vous voyez une petite assiette de fer qui donne du sel, ramenez-la vite, c’est elle la petite machine étonnante !
Ce n’est pas moi qui dis des menteries,
Mais les gens d’autrefois.
Moi, Ruffine, je vous raconte cette histoire.
Je suis de Fénérive-Est, de la forêt bleue.
Ce n’est pas moi qui dis des menteries,
Mais les gens d’autrefois.
Qu’il fasse beau demain,
les jeunes gens pourront faire sécher le girofle…
On pourra aussi en faire la cueillette
et que chacun ait sa part de récolte,
la propriétaire de l’arbre et le cueilleur,
Chacun la moitié…
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