2012-12-05 Ankavaraki, un refuge caché des Antankarana
Ankavaraki, un refuge caché des Antankarana
Dans son voyage à Madagascar, l’explorateur français Mayeur découvre différents lieux de sépultures royales, tels à Ampanangony, localité betsimisaraka à l’ouest de Sainte-Marie, ou Ankavaraki, au Nord de l’île, dans l’Ankarana. Il voyage dans cette partie de Madagascar de novembre 1774 à décembre 1775.
Alors qu’il se trouve dans le village de Lamboeny, roi de l’Ankarana, Mayeur apprend par ses guides qu’au-delà des mornes d’Ankavaraki se situe une vaste plaine enclavée, entourée de toutes parts de rochers presque inaccessibles.
Le sol y est fécond, la culture facile car elle est arrosée d’une belle rivière qui prend sa source à mi-côte des flancs intérieurs de la montagne.
« C’était là qu’était le tombeau de la famille de Lamboeny et le dépôt de toutes ses richesses. On m’assure que le sommet de ces mornes était de corail blanc comme celui qu’on trouve au sommet de la mer et qu’on était de temps en temps obligé de le casser parce qu’il repoussait sans cesse et embarrassait le sentier ».
Mayeur ignore à quel point une telle assertion est fondée. En tout cas, le sommet des Ankavaraky est fait de corail blanc qui déborde sur une partie du sentier y menant. N’ayant rencontré aucun obstacle des habitants voisins, il promet de ne pas descendre dans la plaine.
Du haut du sommet, il se rend compte que la chaine de montagnes, assez élevée et ayant à sa base une grande étendue, est « de roc au pied et de corail en hauteur ». Et comme l’ont décrit ses guides, leurs flancs intérieurs forment à mi-pente une vaste plaine très fertile qui produit en abondance toutes sortes de racines nutritives.
On y trouve aussi du bois. L’étendue est traversée par une rivière dont l’accès est défendu de toutes parts par des glacis naturels rapides et hérissés de coraux. Aucune autre entrée n’y accède, hormis le sentier.
« Aussi ce lieu est-il le refuge ordinaire des gens du pays lorsque la guerre s’allume entre eux et les Sakalava. (…) Les réfugiés cultivent les choses nécessaires à leur subsistance. Ils y ont des troupeaux qui y prospèrent Les femmes et les enfants y trouvent la terre des plantations, tandis que les hommes tiennent la campagne et font tête à l’ennemi. Il est sans exemple que celui-ci y ait jamais pénétré. Le lieu est enfin un poste inexpugnable. On voit même qu’il est impossible de le réduire par famine ».
Mayeur s’émerveille de voir d’en haut cette vaste plaine semblable à un large bassin qui a pour rebords de toutes parts, des montagnes à pic. Celles-ci lui semblent encore plus inaccessibles en-dedans par les habitants que ne le sont leurs flancs extérieurs à l’ennemi. Partout le corail présente des pointes aiguës et fragiles (tsingy) qui en rendent l’accès impossible.
« Comme la rivière qui arrose la plaine se décharge dans les campagnes voisines du côté du Nord et qu’en échappant à travers les rochers, elle forme une issue dont l’ennemi pourrait s’emparer, Lamboeny y avait pourvu, me dit-on. Il avait fait pratiquer en-dedans une digue assez élevée pour fournir une abondance d’eau telle que nul ne peut se hasarder à la franchir. Aux premières apparences de guerre, on faisait refluer toutes les eaux de la rivière de ce côté, ce qui formait un immense réservoir d’où alors elles s’échappaient en torrents rapides auxquels rien ne pouvait résister ».
Cette enceinte est le lieu de sépulture de la famille royale de Lamboeny. Il y fait bâtir des résidences pour certains parents et pour de nombreux esclaves chargés d’entretenir le tombeau et ce qu’il renferme.
« Car c’est là que sont enfermés toutes ses richesses ». Regrettant
de ne pouvoir visiter ce tombeau, faute de l’autorisation du roi, Mayeur quitte les lieux, déplorant « de n’en rapporter que des notions imparfaites et avec l’espoir d’un prompt retour ». Mais cela ne se fera pas, car il ne rencontrera le roi Lamboeny que le 8 juillet 1875 et dans sa résidence à Antsohihy.
Pela Ravalitera
Mercredi 05 decembre 2012
L’Express