2013-01-02 Des populations bien brassées
Des populations bien brassées
Pour diverses raisons, les anciennes peuplades de Madagascar connaissent des migrations intérieures périodiques ou permanentes. Ce qui transforme la carte ethnographique et démographique de l’île.
Dans l’Extrême-nord, notamment le Nord ouest et l’Ouest, un étonnant brassage superpose de nombreux migrants aux populations complètement.
En revanche, certains groupes ethniques, tels les Merina et les Betsileo, se répandent en marées envahissantes dans tout l’Ouest sakalava ; ceux du Sud-Est essaiment vers le Nord et le Nord-ouest.
Enfin, des régions comme l’Extrême-Sud se conservent pures.
Au XVIIe siècle, la domination antakarana (Nord et Nord-ouest) s’étend sur l’Androna dans les régions de Befandriana et Mandritsara. Elle recule progressivement (Nord) devant les Sakalava contre lesquels les Antakarana soutiennent des luttes acharnées.
En effet, les chefs et les principales familles sakalava issus de la province d’Isaka, sur la côte Est- et les Antesaka ont encore conscience, à certaine époque, des liens avec ceux-ci qu’ils appellent les Antesakalava- passent au sud des Hauts-plateaux par le col de Midongy, se scindent en deux groupes : le premier s’établit dans le Mahafaly puis en Androy ; la seconde branche franchit le Mangoky, se dirige vers le Nord où elle conquiert le Menabe puis, plus tard, le Mailaka, l’Ambongo et le Boeny.
Dans le Sud-Est de Mananjary, les chefs Zafindraminia émigrent vers le Sud et fondent en Anosy un royaume dont la capitale est Fanjahira. Vers 1845, à leur tour les Antanosy s’installeront sur le Moyen-Onilahy et sur ses affluents de la rive droite, Isakondy, Teheza, Sakamara. Plus tard, ils s’étendront sur la rive gauche, dans la vallée du Savezy.
Les Bara, originaires de l’Itomampy, s’établissent progressivement dans la vallée de l’Ionaivo, puis celle de Menarandra, d’où ils chassent les Betsileo. De là, ils envahissent la vallée de l’Ihosy et enfin, ils se heurtent aux Sakalava.
Plus au centre, l’assassinat en 1862 de Radama II, détermine une insurrection à la suite de laquelle de nombreux Merina Aémigrent sur les limites orientales du pays sakalava où ils sont connus sous le nom
de Bemihimpa, « les éparpillés ». Ils s’assimilent tant et si bien qu’il est devenu difficile de les distinguer car ils adoptent le genre de vie et même les… modèles de tatouage.
Pour leur part, les Tanala qui se réclament à l’origine des Zafindraminia, s’avancent vers l’Ouest à la suite des Bara. Ils émigrent par la haute vallée de l’Iantara contournant l’Ivohibe par le Nord.
Les Tanala émigrés portent, par la suite, le nom de « Hovalahin’ny Antara » qui n’a aucun rapport avec celui de la caste imérinienne. Cette migration se déroule vers 1880.
On remarque également que Madagascar fait l’objet de deux courants en sens contraire. L’île est fréquentée par les négriers arabes et européens.
À ce propos d’ailleurs, la population malgache connaît de grandes arrivées de l’extérieur. Outre les immigrations comoriennes dans le Nord-ouest, les éléments africano-Makoa sont introduits en quantité à Madagascar au cours du XIXe siècle par les négriers arabes.
Ces esclaves, en provenance du Mozambique, sont débarqués pour la plupart dans les ports de Maintirano, Tambohorano et Baly. Ils sont libérés au cours du grand discours de Ranavalona II le 20 juin 1877 : « Tous les Masombika qui sont venus dans mon royaume sont affranchis et deviennent des sujets libres ».
À propos des esclaves exportés de la Grande île, en 1711 un agent de la Compagnie royale des Indes orientales se plaint : « Les esclaves de Madagascar sont forts mais mutins, séditieux et capables de tout entreprendre. Les exemples en sont récents puisque le 14 janvier 1710, on a été forcé d’en faire pendre deux pour révolte. Ils n’ont que leur fuite en tête, soit dans les montagnes de l’île (Maurice), soit en hasardant de traverser la mer dans de simples canots pour aborder l’île de Madagascar. »
Pela Ravalitera
Mercredi 02 janvier 2013
L’Express