2013-01-12 Un sacrifice méritant royaume
Un sacrifice méritant royaume
La préférence affichée par Andrianampoinimerina pour son fils cadet, Laidama, faillit à maintes reprises lui coûter la vie. Car cela ne plaît pas, mais pas du tout, à ses aînés. L’origine de cette préférence, dit-on, date de longtemps.
Un jour que tous ses enfants, filles et garçons, se trouvent auprès de lui, Andrianampoinimerina les fait dormir dans le Lapabe quand vient la nuit, recouverts de pourpre, sous la garde de l’idole Ikelimalaza.
Au matin, le roi vient les surprendre alors qu’ils sont endormis. Seul Laidama remonte vers le haut de sa natte, comme l’a décidé Ikelimalaza, les autres glissant vers le bas.
Mais ce n’est pas tout. A priori, Andrianampoinimerina ne fait aucune discrimination entre ses enfants qui, à ses yeux, ont les mêmes chances d’accéder au pouvoir.
Même ses fils adoptifs, Rabodolahy, le plus âgés de tous, et Rakotovahiny, deux frères adoptés par sa première femme, Rabodonimerina qui ne peut avoir d’enfant.
La différence pour le grand conquérant se fera par le comportement de chacun face aux ennemis.
Alors que Laidama, malgré son jeune âge, engrange victoire sur victoire, Rabodolahy et Rakotovahiny n’ont à mener qu’une seule expédition guerrière à Ambohibeloma, chez les Tanala.
Ce peuple guerrier, à la résistance héroïque, met en déroute les Hova dont certains sont même faits prisonniers.
Le roi réunit ses hommes (Avaradrano, Sisaony, Marovatana, Ambodirano,
Vonizongo et les Mainty Tsiarondahy) pour demander des explications
car « vous y êtes allés pour prendre le pays et non pour remettre aux Tanala des prisonniers ».
D’emblée, les soldats avouent s’être dispersés pour s’enfuir « sur l’exemple de vos enfants ».
Questionnés à leur tour, les deux frères se comportent différemment. Rabodolahy le prend de haut et lance clairement à son père qu’il ne voit pas pourquoi il risquera sa vie pour un royaume, dont il n’héritera même pas.
Au contraire, Rakotovahiny fait profil bas et reconnaît sa faute. On le connaît : il pardonne toujours toute faute avouée ou reconnue.
Ainsi, Rabodolahy est relégué aux confins de la forêt dans le Mandiavato, chez les Zafinandriamamy, alors que Rakotovahiny est installé près d’Alasora, à Ambohitrandriananahary.
Laidama, lui, est beaucoup plus proche du roi qui lui fait construire palais et pavillon à Antananarivo.
Par la suite, Rabodolahy apprenant que « Laidama discute des affaires de l’État avec le souverain » se met en colère. Aussi n’a-t-il de cesse que de mettre fin à sa courte vie.
Depuis, il le suit en cachette ou l’entraîne hors de sa résidence de Mahazoarivo, un poignard et une courte sagaie sous son lamba, attendant le moment propice pour perpétrer son fratricide.
Mais en vain, car même si Laidama ne se doute de rien, il ne peut s’amuser,
« trop occupé à accomplir les ordres du roi ».
Quelque temps après, les Zafinandriamamy incitent Rabodolahy « à monter au Rova » pour ne pas se faire évincer par « l’usurpateur », car adopté ou non, il est l’aîné de tous les héritiers du roi.
Ce qu’il fait, d’autant que celui-ci le fait mander à Soavimasoandro où Andrianampoinimerina aime à se prélasser.
Mais quelle n’est sa surprise de voir présents tous ses frères et sœurs, leurs mères ainsi que la cour au grand complet.
Avant que la réunion ne commence, le monarque demande à Laidama de s’asseoir près de lui. Cette décision parle d’elle-même et sera par la suite confirmée par le souverain aux Grands du royaume.
La jalousie de Rabodolahy est à son comble et son désir de vengeance ne fait que s’affermir. Il faillit avoir son frère cadet à Andohalo, qui ne doit la vie sauve qu’à sa dextérité à éviter les coups.
Le roi en est outré, sans savoir qu’à défaut d’avoir son fils préféré, Rabodolahy veut assouvir sa fureur sur lui.
Prévenu, bien que n’étant pas très convaincu, il fait arrêter son fils adoptif aux portes du palais et les gardes trouvent sur lui, bien cachées, des armes.
Très vite, pour que les rumeurs sur ce parricide avorté ne s’enflent, Andrianampoinimerina réunit son peuple à Andohalo pour montrer qu’il est toujours vivant et pour annoncer la condamnation à mort de Rabodolahy.
Pela Ravalitera
Samedi 12 janvier 2013
L’Express