2013-01-17 Entre animaux réels et monstres fabuleux
Entre animaux réels et monstres fabuleux
Quand Etienne de Flacourt écrit son « Histoire de la Grande Isle de Madagascar », l’époque est favorable à des descriptions d’animaux fabuleux. Beaucoup d’auteurs pensent alors que cela devait donner plus d’intérêt à leurs ouvrages. Néanmoins, tous les animaux qu’il décrit dans certains chapitres ne sont pas des monstres irréels.
Flacourt débute par les bœufs qui sont les premiers animaux frappants dans ce pays. Il en distingue les «bory» sans cornes ou à cornes branlantes des zébus ordinaires, avec leur « loupe de graisse sur le chinon du cou ». Il cite ensuite, les chèvres et les moutons à grosse queue.
En parlant de « sangliers », il présente surtout des potamochères (Potamochaerus larvatus larvatus) et il indique bien un caractère distinctif de ces animaux. Ils ont « à côté du nez deux cornes qui sont comme deux callosités ».
En revanche, il confond le « trandraka » ou tanrec (Centetes ecaudatus) avec les porcs-épics qui n’existent pas à Madagascar. Puis il mentionne les hérissons ou « sora » (Ericussetosus), le « fosa » qui, selon Henri Poisson, n’est pas le cryptoprocle mais semble se rapporter à la fossa de Dauberton (Fossa Daubertonni) puisque Flacourt écrit que « c’est un animal semblable au blaireau de France ».
Mais il signale aussi le « farafossa », un carnassier de la grandeur d’un renard à queue fort grande et longue avec le poil de la couleur de celle du loup. Ce qui correspond à la description du « fosa » (Cryuptoprocta ferox).
Flacourt cite de même le chat sauvage (Felis madagascariensis), puis des chiens à museau long, oreilles courtes et ayant la robe du renard.
On reconnaît le chien « Pariah », l’ « alika » de la brousse qui, d’après H. Poisson, s’apparente très fortement à la race canine Pariah de l’Inde.
Toutefois, l’auteur de l’ « Histoire de la Grande Isle de Madagascar » confond les Lémuriens avec les singes, bien qu’il les décrive avec assez de précision pour en faciliter la distinction- « Lemur varregatus », «L.mongos»,
« L. catta », « Hapalemur », « L. simus », « Propithecus verreauxi » - et, sous le vocable d’écureuil gris, il parle d’une espèce de « Microcebus » ou de Chirogale qui vit dans les trous d’arbres.
Revenant aux carnivores, il mentionne le « Vontsira » (Galidia elegans) qu’il compare à la belette, le « Fanalouc » (fanaloka) est l’ « Eupleres Goudoti » et la civette malgache ou « jaboady » est le « Viverricula Schegeli ».
Le groupe des mamifères se termine par la description de quatre animaux fantastiques que, toujours selon H. Poisson, Flacourt n’a certainement pas vus mais a décrits d’après les récits issus de l’imagination des autochtones et « il est fort difficile de démêler ce qu’il peut y avoir d’exact et de fabuleux ». Si comme le fait remarquer Alfred Grandidier, on peut sans doute voir dans « l’Antamba », le cryptoprocte, « il faut avouer qu’il ne ressemble guère à un léopard ».
Le mot utilisé par Flacourt « tretretretre »- transcrit par Grandidier par « tratratratra »- se rapproche du terme « tratraka » employé dans le Sud-est pour désigner le cryptoprocte.
D’après H. Poisson, quand les Malgaches de cette partie de l’île veulent figurer un mauvais génie, ils lui donnent la forme d’un « fosa » à figure humaine !
Le « mangarsahoc » de Flacourt n’est autre que le fameux « songomby » des légendes malgaches, le « breh » est la licorne, animal fabuleux du Moyen-âge.
Passant aux reptiles, Flacourt décrit le caméléon et trois espèces de lézards, mentionne un certain nombre de serpents qu’il appelle couleuvres mais qu’il distingue par leurs noms malgaches : « mandatsa » (Pelophilus madagascariensis), « menarana » (Lioheteroden madagascariensis), « renivitsika » (Eteirodipsas Colubrina) qui vit dans les fourmilières. Chose étonnante, on trouve dans cette nomenclature des reptiles, rats et souris.
Quant aux insectes et Arachnides, Flacourt cite surtout les espèces venimeuses (scorpions, cent-pieds…) décrivant par ailleurs la « vankoho » dont le nom signifie cognée.
Pela Ravalitera
Jeudi 17 janvier 2013
L’Express