2013-02-19 Hagamainty confond les Grands du royaume
Hagamainty confond les Grands du royaume
La paix instaurée en Imerina, Andrianampoinimerina décide de créer les marchés à la place des Fihaonana, anciens lieux de rencontre instaurés par les guerriers pour éveiller leurs butins de guerre. Il réunit par deux fois ses sujets, à Andohalo et Antsahatsiroa, pour leur annoncer la bonne nouvelle et les encourager à y vendre tous les produits de la terre, de l’élevage, de l’artisanat, de la forêt et même les esclaves. Sauf le porc, l’alcool et le chanvre qui ne doivent pas pénétrer dans le centre de l’Imerina, mais rester au-delà de l’Ombifotsy à l’Ouest, de l’Ambodinangavo à l’Est, de l’Analaiva et du Vakinisahasarotra au nord.
Quelques jours plus tard, il réunit les Grands de son royaume pour discuter de la législation à appliquer dans les marchés quotidiens et hebdomadaires. La plupart de ses conseillers lui suggèrent alors de prendre une part de tous les produits, du simple manioc aux esclaves. Ce que le souverain agrée. Pourtant, le sage Hagamainty s’insurge contre cette idée de généraliser cette sorte d’imposition, s’appuyant sur le discours même du souverain à Andohalo et Antsahatsiroa. Il met, entre autres, en garde la contradiction entre l’incitation des sujets à vendre et à acheter et l’imposition de cette règle à tous les produits, qui ne peut qu’être décourageant.
En effet, le roi a expliqué aux « Ambaniandro » le but des marchés : donner la chance à tous, surtout aux moins nantis, de se faire de l’argent en commercialisant leurs produits. Il a exigé des riches, à commencer par la famille royale, de « faire vivre le marché ». Ils permettront aussi de retrouver les objets volés. La suggestion des autres Grands va pourtant à l’encontre de cet objectif. « Vous imposez cette règle, mais c’est nous, les Grands, qui collectons les produits en votre nom, prenant au passage aussi notre part ». De quoi appauvrir et faire fuir les marchands et donc de fermer les marchés. « D’ailleurs, même du temps des Fihaonana, aucun chef de clan, si belliqueux soit-il, ne s’est permis de le faire ».
En outre, selon Hagamainty, le fait de prendre une partie des produits mis en vente équivaut à « punir des innocents », c’est-à-dire leur faire payer une amende pour un délit qu’ils n’ont pas commis. Et de poursuivre :
« Si vous persistez à appliquer cette règle, que ferez-vous de tous ces produits Vous les partagerez à votre famille, à votre parenté, à nous les Grands et nous serons repus, notre richesse augmentera, mais le peuple s’appauvrira. » Continuant sur sa lancée, le sage conseiller assène : « Pour simplifier, pourquoi ne pas fermer les marchés et accaparer immédiatement tous les biens des Merina puisque, en fait, nous voulons aller à l’encontre de ce qui a été dit à Andohalo et à Antsahatsiroa, que nous trahissons les Ambaniandro »
Par ailleurs, abordant un autre aspect du marché, la clientèle, Hagamainty montre quelque réticence vis-à-vis du probable comportement des princes et des Grands : les marchands peuvent-ils sans crainte refuser de leur vendre leurs produits, s’ils exigent un prix dérisoire ou de passer devant des clients plus humbles Devant cette tirade, les autres Grands se taisent, ahuris, quelque peu apeurés. Pourtant, le roi ne se trouble pas. Au contraire, il leur demande de lui faire part de leur avis, à l’instar de Hagamainty. Mais ne sachant que dire, ils demandent au roi un temps de réflexion. Ils reviennent le lendemain, sans Hagamainty. Le Tsimahafotsy Rabefiraisana parle en leur nom et ne fait que répéter, dans un style plus nuancé, les paroles du sage conseiller. Ce qui a le don d’énerver le roi qui insiste pour avoir « votre avis personnel ».
N’ayant rien à ajouter, un autre Grand, Rafiara, estime qu’il faut appeler le conseiller absent. À quoi le souverain, de plus en plus irrité, rétorque : « Ce n’est pas le seul Hagamainty qui gouverne, mais vous tous ! À moins que vous n’ayez aucun conseil à me donner ! Quand vous discutez chez vous pour le bien de votre foyer, avez-vous aussi besoin de Hagamainty » Sans se décontenancer, un troisième Grand, Ranoko affirme que seule une idée née de discussions, est fondée. Mais le roi persiste alors à avoir leur opinion. Finalement, ils reconnaissent qu’ils partagent tout ce que Hagamainty a dit.
Pela Ravalitera
Mardi 19 fevrier 2013
Notes du passé
L’Express