2013-02-22 Destination en pleine promotion début XXe siècle

Publié le par Alain GYRE

Destination en pleine promotion début XXe siècle

 «Forêts tropicales à la densité impénétrable où luttent les espèces les plus diverses offrant un champ étendu aux désirs d’exploration. Fleuves majestueux, rivières mystérieuses, tourmentées, filets d’eau et torrents impétueux. Cascades murmurantes et grondantes chutes d’eau. Pistes aux kilomètres de lignes droites trouant des régions apocalyptiques, routes bordées de roses ou de mimosas serpentant en montagnes, le tout franchissant vieux ponts, ouvrages modernes, radiers ou bacs ; plateaux arides ou plaines verdoyantes, collines aimables ou montagnes redoutables. Douces places aux cocotiers de paysage tahitien ou côtes bretonnes aux rochers noyés dans l’écume. Cratères transformés, lacs grandioses et pacifiques ou étranges masses d’eau ».
La destination Madagascar n’est pas une nouveauté comme le prouve cette présentation de l’île faite par un chroniqueur du premier quart du XXe siècle.
« Toutes les catégories de touristes peuvent être touchées, tant est grande la gamme de sites qui s’offrent au voyageur à Madagascar ». Qu’il s’agisse d’un court séjour complétant le voyage d’un homme d’affaires, d’une randonnée paisible, d’une cure thermale ou d’une excursion sportive, de pêche, de chasse, voire de camping ou même d’« alpinisme », chacun peut trouver « le paysage, le terrain qui conviendra au genre de tourisme pratiqué et aux sensations désirées ».
Le chroniqueur poursuit sur sa lancée et se laisse aller dans l’exaltation de tous les aspects de la nature, toutes les joies de l’eau, de l’air et du soleil offerts au voyageur qui « emportera de Mada­gascar un souvenir inoubliable ». Et ce, avec Antananarivo comme centre désigné des excursions, « la capitale qui jouit d’une situation exceptionnelle qui la place au départ de la plupart des circuits ». Certains parmi les plus beaux, sont dans ses abords immédiats, d’autres aux confins de sa province, d’autres encore plus éloignés. Ils nécessiteront, toutefois, préparations et moyens de transport
« qu’on ne trouvera qu’ici ». Parmi les curiosités de la ville des Mille, son Zoma évidemment, l’une de ses principales attractions, « un monde en miniature grouillant de peuples, étincelant de couleurs, fourmillant de produits ».
Pour le publiciste Urbain-Faurec, c’est « un spectacle inchangé depuis les anciens jours, en plein centre de la ville. Le plus important est celui du vendredi. De tous les villages des environs, paysans, pasteurs, éleveurs et artisans apportent au marché le produit de la terre ou de l’atelier ». Sous des tentes sommaires et des parasols colorés s’entassent les légumes, les fruits et les lourdes soubiques débordantes de riz, tandis que « sur le bord d’un trottoir qu’encombrent les chalands, les fleurs des Hauts-plateaux jettent une note chaude ». Plus loin, « en amoncellement mouvant et piaillant, les volailles. Et en petits tas méticuleusement dosés, s’alignent sur des nattes toutes les herbes de la pharmacopée malgache, les fanafody qui guérissent de la fièvre, les graines qui calment, les écorces qui cicatrisent et jusqu’aux plantes dont les savants mélanges composent des philtres infaillibles ». Sans oublier les sculpteurs de bois, peintres sur soie, brodeurs de rabanes et tisseurs de paille fine qui exposent « leurs œuvres ingénues mais habiles ».
Voilà pour les produits. Quant aux marchandes, les écrivains Marius et Ary Leblond les décrivent recroquevillées dans « leurs pagnes d’un blanc frais », sur des marches de terre battue, les visages « jaunes comme de la cire », la chevelure lisse « aplatie sur le crâne », le front plissé. Elles indiquent de leurs mains caressantes les ananas rouges dans des corbeilles de paille verte, s’agenouillent devant des nattes de manioc, de piments, de crevettes séchées, « dans une attente plaintive », de l’acheteur. Et l’on voit « dans une tranquillité de solitude », les chaudronnières « aux chevelures agglomérées comme de la suie », ranger des marmites et des coupes en terre noire, et les « Ramatoa aux joues endormies étendre des fripes avec des manières propres ». En pleine lumière, les vendeuses de lamba mortuaires « assises en cercle comme autour d’une tombe, déroulent de leurs genoux sur le sol les linceuls roux à rayures vertes », tandis que les marchandes de soie, tout en discutant, cardent « de leurs doigts osseux de gros écheveaux scintillants »…

Pela Ravalitera

Vendredi 22 fevrier 2013

Notes du passé

L’Express

Publié dans Notes du passé

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