2013-03-07 Le canal Andriantany pour transporter les produits
Le canal Andriantany pour transporter les produits
«O n peut se demander si la prise de Tananarive par Andrianjaka, qui préfigure celle d’Andrianampoinimerina, n’est pas l’un de ces doublets légendaires fréquents dans les traditions populaires. Andrianjaka aurait expulsé du rocher d’Analamanga les Vazimba : rien n’autorise à croire que ceux-ci aient été des Noirs d’Afrique ; il est plus vraisemblable qu’ils représentaient un groupe de dialecte malayo-polynésien occupant les Hautes-terres avant les Merina » (Ch. Robequain : « Une capitale montagnarde en pays tropical : Tananarive », 1949).
En 1787, la principauté d’Ambohimanga échoit à un jeune homme d’une vingtaine d’années, Imboasalama, que force prodiges et prédictions annoncent comme un grand roi. Sachant qu’il porte
« la bénédiction heureuse de ses ancêtres », Imboasalama (le chien vigoureux) qui est un nom prophylactique contre le mauvais sort, entreprend d’imposer son autorité en vue d’unifier l’Emyrne. « Doué d’une intelligence supérieure au service d’une active énergie, équitable et bienfaisant à son peuple, Andrianampoinimerina (le Seigneur au cœur de l’Imerina et nom de règne d’Imboasalama) entreprend la conquête d’Antananarivo » (Revue de Madagascar spéciale, « Tananarive », MCMLII).
N’y réussissant pas par le moyen pacifique d’un mariage avec la fille du souverain rival, Andrianamboatsimarofy, il fait donner l’assaut à la ville. Mais les guerriers d’Ambohimanga qui y pénètrent, doivent l’évacuer précipitamment « pour échapper à l’épidémie de petite vérole qui la ravage ». Antananarivo n’est prise qu’en 1794, à la troisième tentative. Le succès de l’assaut final aurait amené Andrianampoinimerina à prononcer ces paroles de « sage politique » : « Ne pillez que les poulets ; le royaume est à moi et tous les Merina sont mes enfants ». Il renoue ainsi avec la tradition d’unité et de grandeur du royaume merina léguée par l’ancêtre Andrianjaka et ses successeurs. « Le Rova royal était au milieu de Tananarive ; Tananarive était au milieu de l’Emyrne ; il fallait que l’Emyrne devînt le milieu du royaume immense qui n’aurait de limite que la mer ». La restauration de la monarchie merina date de la prise d’Antananarivo, dont la deuxième fondation par Andrianampoinimerina marque la fin des luttes intestines avec le rétablissement de l’unité sur les Hauts-plateaux centraux.
Tous les territoires voisins soumis, le pays pacifié, le grand roi « illettré mais génial » ramène son peuple à la terre. Il institue une organisation toute militaire de l’agriculture qui affermit sa domination. Il installe dans sa capitale 1 000 soldats pris dans les principaux clans du Nord : un tiers chez les Tsimahafotsy d’Ambohimanga, un autre chez les Tsimiamboholahy d’Ilafy et un autre chez les Mandiavato d’Ambohidrabiby. Il les groupe sous le nom de Voromahery (les Faucons) et cinq postes de surveillance de 100 servent chacun de bastions avancés à la ville.
Pour subvenir aux besoins d’une population considérablement accrue par cet afflux de colons, le roi reprend les travaux de mise en valeur de la plaine du Betsimitatatra, délaissés par les luttes civiles. Il fait creuser un canal (Andriantany) pour faciliter le transport des marchandises d’Ambohimanga à Antananarivo. Il construit les nouvelles digues de Mamba et d’Alasora, tandis que les anciennes sont refaites. Il édicte un ensemble de prescriptions très sévères pour conserver l’œuvre réalisée. Les digues préservent la plaine contre les crues du fleuve, mais elles servent aussi de chemins et de divisions administratives. Ce qui facilite la circulation et supprime les contestations entre propriétaires et prestataires responsables de l’entretien (lire Notes du 4 mars). Le grand marché du vendredi, le Zoma, est transporté aux abords immédiats de la ville pour bénéficier de la sécurité et des immunités royales. Un nouveau système de poids, de mesures et de monnaies est rendu obligatoire afin d’encourager le commerce.
« Capitale politique et administrative d’un royaume en pleine expansion, située au centre d’une région productrice, principal centre de consommation du peuplement le plus dense, le plus nombreux et le plus industrieux de la Grande île, Tananarive verra consacrer sa primauté qu’elle ne perdra plus et qui ne lui sera jamais contestée ».
Pela Ravalitera
Jeudi 07 mars 2013
Notes du passé
L’Express