2013-03-14 Des noms de quartiers très expressifs
Des noms de quartiers très expressifs
Si son père ouvre la route d’Antananarivo vers le nord, Radama 1er, lui, s’attaque à l’ouest et au sud, passant par Ambatovinaky, le carrefour d’Antsampanimahazo, Ambatomitsangana, Antaninarenina, Ambatonilita, Isoraka et Ampasandrainiharo pour atteindre Isotry.
E. Boudin et J.J. Rabearivelo – « Tananarive, ses rues et ses quartiers »- pensent que ce dernier nom est l’abréviation du mot composé « vono-sotry » qui désigne l’épreuve qu’on fait subir par le tanguin. « Vono est tombé (il ne s’emploie plus) mais sotry est resté avec l’article i, d’où Isotry ». Les deux auteurs se réfèrent à l’épreuve du tanguin, le fameux poison végétal qu’on a fait absorber aux prévenus afin de déceler leur culpabilité ou leur innocence. Le 11 mai 1863, c’est le sort réservé à 21 Menamaso, nom donné aux compagnons d’enfance de Radama II, « mignons » qu’il conserve autour de lui une fois monté sur le trône. Ces jeunes gens de toutes provenances aussi bien des castes andriana qu’à l’une des castes hova, sont tués à coups de sagaie à Isotry, d’après les ordres du Premier ministre Raharo, fils aîné de Rainiharo. C’est également à son instigation que Radama II est finalement étranglé.
À partir d’Ambatonilita, il est aussi possible de descendre Ambatomena (à la pierre rouge) pour arriver à Antsahavola (à la vallée d’argent dans le sens de riche vallée). C’est le lieu de réjouissance de la famille de Ravoninahitriniarivo, fils de l’une des filles de Rainiharo.
Si l’on remonte vers Antsampanimahazo- les Quatre chemins devenus cinq en 1897- on descend vers le sud dans le quartier d’Amparibe. L’expression qui vient immédiatement à l’esprit est celle de « Au grand lac » (Amparihy-be dont le « hy » serait tombé). Mais le RP Callet dans son « Tantara ny Andriana eto Madagascar » écrit notamment :
« C’était dans ce quartier que se trouveraient les silos dans lesquels on mettait le isam-pangady (part de chaque angady), dîme qui revenait au roi Andrianampoinimerina ». Dans ce cas, l’origine du mot serait « Am-vary-be », le « v » se changerait en « p ». Mais les deux auteurs signalent à propos du mot composé « am-pari-be » que le mot « vary » devient rarement, pour ne pas dire jamais, « pari » !
Un peu plus bas, c’est Mahamasina, grand quadrilatère à peu près plat, borné au nord par Amparibe et le quartier d’Avaratr’ Imahamasina, à l’est par les falaises occidentales de la vieille cité, au sud par Atsimon’ Imahamasina au pied d’Ambohijanahary, à l’ouest par le quartier de Befelatanana, tiré du nom d’un palmier, Felatanana, la paume de la main qui, en fait, indique grossièrement la forme de la feuille de ce palmier. Au coin nord-est, un escalier permet d’accéder à Ambodinandohalo.
Mahamasina (qui rend sacré) a été le champ de Mars d’Antananarivo. C’est là qu’ont eu (et ont) toutes les manifestations militaires et, par trois fois, des souverains sont couronnés. Le couronnement le plus remarquable est celui de Radama II. Il est l’objet du déploiement d’un faste inouï. C’est Jean Laborde qui organise tout. « Pour la circonstance, on avait construit une estrade superbement ornée à côté de la pierre sacrée, Vatomasina, sur laquelle, comme à Andohalo, le roi ou les reines devaient monter, obligatoirement, avant d’être sacrés ».
Au nord-ouest de Mahamasina, se trouve Anosy (à l’île), le lac où il y a une île (lire Note du 16/01/2013). Il y a primitivement des rizières qui ont fait partie du Betsimitatatra. Le lac artificiel avec l’îlot sur lequel est construite une poudrière, est une création de Radama 1er. L’une des usines qui fournissent la poudre… ou plus modestement l’un des ateliers où on la fabrique, est située sur la partie d’Isoraka qui se trouve en corniche sur le lac. Un des directeurs de cette usine est le nommé Ravarikia. « Il fut l’un des neuf jeunes gens envoyés en Angleterre en 1820 pour s’y instruire. Il fut baptisé à Londres, le 8 octobre 1824 dans la religion protestante. Il mourut à Tananarive le 15 octobre 1853, lors de l’explosion de sa propre usine d’Isoraka ».
Pela Ravalitera
Jeudi 14 mars 2013
Notes du passé
L’Express