2013-03-16 La politique d’ouverture de Radama 1er
La politique d’ouverture de Radama 1er
Andrianampoinimerina n’a aucune relation avec les Occidentaux qui demeurent sur la côte, n’entretenant avec eux que de lointains rapports commerciaux à travers des intermédiaires. Il leur prohibe l’accès de la ville des Mille.
Cette interdiction, absolue sous son règne et qui ne souffrira plus tard qu’un très petit nombre d’exceptions, durera cinquante ans après sa mort.
Quand son père tourne le dos, Radama devient roi, « roi absolu qui dispose sans contrôle des hommes et des choses». Il est « Andriamanitra hita maso », le dieu visible qui se déclare maître de la terre et du ciel. Avec ce tempérament toutefois que son autocratie doit, dans toutes les circonstances d’une exceptionnelle gravité, s’en référer publiquement au peuple assemblé ; lequel « Ray aman-dreny » est le Père et la Mère du souverain régnant (Revue de Madagascar spéciale, « Tananarive », MCMLII).
Et c’est au peuple qu’il s’adresse pour justifier sa décision de commercer dans sa capitale avec les Vazaha, les étrangers, tout en expliquant sa politique étrangère. «Si je les fais monter ici en voici la raison : c’est que je veux créer une armée ; et ces Anglais m’aideront à former des soldats qui défendront mon royaume, qui en seront les cornes protectrices. Les Anglais ne nous cacheront rien de ce que les Européens ont chez eux ; ils nous fourniront des canons, des fusils, de la poudre, des pierres à fusil et des balles ; avec ces armes, on peut agrandir son royaume. De plus, ils nous apprendront à fabriquer de belles et bonnes choses, de superbes habits rouges, de beaux habits noirs, des sabres magnifiques, enfin tout ce qui se fait de bien au-delà des mers».
Il impartit à ce jeune souverain, digne continuateur de son père, d’initier son pays à la « civilisation moderne ». Mais s’il accueille bien les Vazaha, il ne le fait pas sans intérêt.« Il attendait d’eux des enseignements profitables, des armes pour vaincre, ainsi que tous les moyens propres à asseoir sa domination et à l’étendre jusqu’à la mer, conformément à la politique définie par Andrianampoinimerina qui avait dit : la mer sera la limite de ma rizière ».
Radama sait, cependant, doser avec habileté les influences anglaises et françaises qui agissent autour de lui pour être prépondérantes et il joue avec finesse de leurs querelles et de leurs rivalités qui « n’ont jamais été aussi graves qu’il a été de mode, au début du XXe siècle, de le raconter ».
L’objet des tractations avec les Vazaha reste le même et demeure toujours profitable : le roi d’Antananarivo vend des esclaves à l’usage des plantations de canne à sucre, surtout des îles Mascareignes. Car le seul commerce extérieur de l’île consiste, à l’époque, dans la traite d’esclaves dont le marché le mieux fourni, « le plus achalandé », est Antananarivo. « C’est de ce trafic terriblement humain que le roi, ses nobles andriana et ses commerçants hova tiraient leurs ressources en devises que l’on évaluait en piastres d’argent. Mis à part les esclaves de case ou domestiques, la masse exportable était faite de prisonniers de guerre, de délinquants de droit commun ou de criminels politiques. Tous les moyens étaient bons pour se procurer cet objet commercial : on faisait des expéditions guerrières contre les villages ennemis ou rebelles, à la fin desquelles les gens en état de marche étaient acheminés jusqu’à la côte, liés les uns aux autres par de longues files. Quant aux incapables… souvent sans pitié, ils étaient passés à la sagaie ».
Les tractations fréquentes et nombreuses auraient porté chaque année sur plusieurs milliers d’individus. Et ce, « sous réserve de l’acquittement d’un droit de 2 dollars et demi par tête au profit du trésor royal : la prospérité du vieux Tananarive fut pour cette raison souvent scellée de larmes et de sang. Ceci dura jusqu’à ce que l’exportation du bétail ait supplanté celle de l’homme ».
Pela Ravalitera
Samedi 16 mars 2013
Notes du passé
L’Expres