Danses - Jean-Joseph Rabearivelo

Publié le par Alain GYRE

 

Danses

 

Chuchotement de trois valiha

      son lointain d’un tambour en bois,

      cinq violons pincés ensemble

et des flûtes bien perforées :

 

La femme-enfant avance avec cadence,

      vêtue de bleu --- double matin !

      Elle a un lambe rose qui traîne,

et une rose sauvage dans les cheveux.

 

Est-ce une pousse d’herbe haute, est-ce un roseau

      qui s’agite à l’orée du bois ?

      Est-ce une hirondelle des jours calmes,

      ou une libellule bleue au bord du fleuve ?

 

La femme-enfant avance avec cadence,

      muette soudain de bonheur.

Elle écoute trois valiha, un tambour en bois,

des violons et des flûtes.

 

Mais voici que ses lèvres tremblent,

      où surgissent des songes

irrésistibles au point de devenir des plaintes,

et même des chants après :

 

Et la vieille femme s’émeut aussi

et vient prendre part à la danse

un pan de son pagne est dans la poussière,

tout comme ses jours qui déclinent.

 

Ce ne sont ni plaintes, ni chants

qui fleurissent son visage :

des larmes l’imprègnent seules

au souvenir de tous les morts…

 

Se souvenir… Comme une pleine lune,

près de chavirer et de n’être plus visible,

voici le printemps qui s’effeuille

et n’est plus qu’un tombeau de feuilles mortes…

 

Et les doigts se rencontrent :

les doigts frêles de la femme-enfant,

et les doigts inertes de la vieille femme,

doigts pareillement translucides –

 

se rencontrent et forment comme une passerelle

qui relie le crépuscule

déjà éclos sur les collines

avec le jour qu’annonce le coq.

 

Presque-Songes, p. 67-68

 

Dihy

 

Ritsodritso-baliha telo,

      gobogobobok’ amponga tapaka,

      lokanga dimy indray dinidy

      sy sodin-taolana tsara loaka :

 

Io misonenika Ratovovavy,

      miakanjo manga marain-droa ! –

      Ny lamba valaka, mavokely :

      raozy gasy ao anaty volo.

 

Tsaokam-bero sa bararata

      miararetra any amoron’ala ?

      Sidintsidin’ny andro meva

      sa angidi-mangan’ny eny an’ony ?

 

Io misonenika Ratovovavy,

      Moana tampoky ny fiadanana

      valiha telo, ampongatapaka,

      Iokanga, sodina no indray henoiny.

 

Fa injay ny molony mangovingovitra,

      ipololoran’ny nofinofy :

tsy toha intsony ka zary kalo,

dia zary hira nony avy eo !

 

Mba hontsa koa Ravaviantitra,

      Ka io mirotsaka mba mandihy :

      mitari-joro ny ila-sikiny

      dia toy ny androny mirefarefa.

 

Tsy kalokalo na hirahira

      no mampifelana izato endriny :

ranomaso no mamonto azy,

      mahatsiaro ny maty rehetra…

 

Mahatsiaro…Toa fenomanana

      efa ho rendrika sy tsy ho hita,

inty mihintsana ny lohataona,

      ka zary fasana ravi-maina…

 

Dia mifanojo ny loha tondro :

      ny tondro mihantsin-dRatovovavy

      sy ny tondro fola-dRavaviantitra,

      Samy tanteraky ny hazavana.

 

Mifanojo ka toa tetezana

      ifanohizan’ny alin-kely

      efa foy eny an-tendrombohitra,

      sy ny andro maneno akoho !

 

Saiky-Nofy, p. 161-162

 

 

 

 

Jean-Joseph RABEARIVELO

Six Poètes Malgaches

Textes malgaches choisis et traduits par

François-Xavier RAZAFIMAHATRATRA

 

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