Iary, un village original betsileo

Publié le par Alain GYRE

Iary, un village original betsileo

 

Sur la route d'Ambo­sitra à Fandriana, perché sur une colline et caché par des eucalyptus mais visible de loin, se trouve le village d'Iary. S'il semble de prime abord n'offrir aucune particularité, il présente pourtant une très grande originalité,
écrit en 1973, l'ethnologue Rantoandro.
Le nom du village lui vient d'une mosaïque de rizières en terrasses et des multiples fossés qui l'entourent et qui ont contribué à le conserver.
« D'après les lovantsofina (tradition orale), la fondation d'Iary, associée à l'origine à la création de rizières, aurait vu le rassemblement d'un troupeau immense de bœufs destinés au travail de la terre; ainsi serait apparu le nom Iarinaomby devenu plus tard Iary tout court ».
Ce petit village modeste possède, toutefois, une riche tradition historique. Toujours, selon les « lovanantsofina », les fondateurs d'Iary seraient les descendants d'un souverain de l'Amorona, appelé Randriamaopanalina. Randrianonifomitany, probablement le petit-fils de ce souverain, se serait alors déplacé vers l'endroit où se trouve actuellement le village, dont la fondation lui est attribuée.
Deux hypothèses pourraient expliquer l'origine du village.
La première laisse supposer qu'Iary aurait pu naître de la désagrégation du royaume betsileo d'Ambositra ou lors même de la conquête d'Ambositra par les Merina. Dans la seconde, « on pourrait aussi le rattacher à la dynastie de la partie méridionale du Betsileo, dynastie originaire de la Matitanana ».
L'accès dans l'enceinte du village est protégé par un réseau inextricable de fossés. Du bord intérieur du premier au dernier, huit petits fossés secondaires rejoignent le chemin de terre « de construction récente », déterminant de véritables murettes. Si à l'entrée principale qui se trouve au nord, le fond en est exploité par les villageois,
« dans le pourtour, les parois abruptes donnent une idée du travail de terrassement et de déblaiement qu'ont dû demander de tels ouvrages ».
Aux dires des notables, le creusement des fossés n'a pu être réalisé que grâce à l'eau habilement conduite jusqu'au village à partir de la colline voisine. La même eau a été également utilisée dans les rizières, grâce à de vastes exutoires appelés « vavaniso ». Il en existe deux qui interrompent le réseau de fossés, diamétralement opposés, l'un à l'ouest, l'autre à l'est. Chaque fossé possède un nom, Imaliarivo, Ibelabela; Am­boara, Ambongo, Ankadian­drefana, Ankadisahala...
Deux portes permettent l'accès au village, l'entrée principale située au nord et à son opposé, une issue qui sert en même temps aux bœufs.
Si des anciennes maisons, il ne reste plus que quelques cases, en revanche le tombeau où est enseveli le fondateur du village et l'enceinte du « kianja » sont presque intacts au début des années 1970.
Le premier, placé en un endroit surélevé, surplombe la grande place. Celle-ci se trouve à l'ouest de la tombe dont il n'est séparé que par un empilement de pierres qui aurait constitué l'enceinte du «kianja». Emplacement « qui est encore visible sur deux côtés, au nord et à l'est. Les deux autres côtés ne possèdent que des traces de pierres grossièrement alignées ».
Au nord de celui-ci, une grande dalle de pierre de 21m de haut sur 1m50 de large soutient un autre alignement de pierres. D'après les villageois, ce serait un « tafotona » (idole protectrice du village) servant surtout à le préserver de l'incendie. « Un incendie déclenché au village s'éteindrait si l'on arrosait le monument ».
Deux objets anciens sont aussi remarqués dans le village d'Iary. Un morceau de canon dont la provenance est inconnue de l'auteur, et une pierre taillée cylindrique (86 cm de long sur 25 cm de diamètre).
« Cette pierre aurait pu être un tokonana servant de marchepied pour pénétrer à l'intérieur d'une maison. Mais ses dimensions, fort modestes, laissent planer le doute. On pourrait plutôt penser qu'il s'agit d'un des éléments d'une colonne en pierre ».
« Le village d'Iary porte ainsi, bien des témoignages de son passé, du temps où isolé, il se rattachait à Ambositra dont il était certainement une des nombreuses principautés. Il garde son originalité par l'enchevêtrement de fossés qui défend son entrée et les vestiges conservés au centre même du village».

Pela Ravalitera

Mercredi 28 mars 2012

L’Express

Publié dans Notes du passé, Histoire

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