Conte: La Pintade et la Poule

La Pintade et la Poule
La gourmandise et le cupidité
Fatalement plongent dans l’esclavage
Ceux qui ne savent pas leur résister.
Le conte que j’apporte en est un témoignage.
Après avoir en vain dans toutes leurs rizières
Cherché quelques grains de paddy,
Mais n’ayant rencontré que de petites pierres,
Pour amuser leur appétit,
Dans un enclos rempli de plantes délicates
La pintade et la poule arrachaient des patates
Et causaient : « quand j’aurai fait une ample moisson,
Disait la poule en ma maison
Vite j’irai cacher les plus beaux tubercules,
Non sans m’être repue, ici, des minuscules,
Quand on est prévoyant, on pense au lendemain.
Ces fruits sont très sucrés, ils plaisent aux humains,
Je veux en entasser pour de folles bombances.
- Tu fais preuve, je crois, de beaucoup d’imprudence,
Répondit l’autre, et la raison,
C’est qu’un oiseau trop lourd souvent mord le gazon.
Certes, je vais manger, car la faim me harcèle,
Mais je ne prendrai rien pour alourdir mes ailes ;
Et si le maître de ce champ
Nous apparaissait, menaçant,
Moi, vive comme une alouette,
Libre, légère et satisfaite,
Vers la forêt
Je volerais,
Riant de sa déconvenue.
- Moi j’accumulerai des patates ventrues,
Reprend notre gourmande, et toutes deux, d’ailleurs,
Pourquoi sortirions-nous de ce lieu séducteur
Sans être bien rassasiées ?
Nous pouvons devancer de beaucoup l’arrivée
Du propriétaire alors interdit. »
Elles firent comme elles avaient dit :
Elles mangèrent.
Mais nos commères,
Au beau milieu de leur repas,
Entendirent soudain les pas
Du maître qui venait visiter son domaine.
La pintade avisée en un vol disparut.
La poule, vainement, les pattes toutes pleines,
Essaya de partir : Vers elle on accourut,
Dans l’enclos enfermée elle devint esclave.
La pintade, toujours, vit libre, sans entrave,
Et l’homme, depuis lors, suivant son appétit,
Prend les œufs de la poule et même ses petits.
Contes malgaches
Autour du dzire
Texte de J. Landeroin
Librairie Delagrave