Le coucou et le héron.

Le coucou et le héron.
Le héron venait d’achever un nid si magnifique qu’on ne voulait pas y entrer, de peur de l’abîmer. Il y logeait depuis peu
Un jour, il partit à la recherche de nourriture au bord d’un étang. A son retour, il constata que le nid était occupé ; quelqu’un lui barrait l’entrée.
- Qui est chez moi ? demanda le héron, obligé de rester au-dehors.
L’occupant répondit, d’un ton de plus en plus épique :
- C’est moi le coucou aux yeux rouges,
Moi qui parviens à maîtriser le caïman de Menarandra,
En le saisissant par le thorax.
Qui parviens à maîtriser le caïman de Menakompy,
En la saisissant par la queue.
- C’est le coucou, dit le héron en s’envolant à tire-d’aile.
Quelque part dans la brousse, il rencontra le pique-bœuf.
- Quoi de neuf ? demanda le pique-bœuf.
- J’ai un problème, répondit le héron. Un méchant coucou s’est emparé de mon nid. Il faut le déloger. Peux-tu me donner un coup de main ?
- On y va ! dit le pique-bœuf.
Lorsqu’ils arrivèrent près du nid, le pique-bœuf demanda de l’extérieur :
- Qui est chez le héron ?
-
Le coucou répondit avec la même effronterie :
- C’est moi le coucou aux yeux rouges,
Moi qui parviens à maîtriser le caïman de Menarandra,
En le saisissant par le thorax.
Qui parviens à maîtriser le caïman de Menakompy,
En la saisissant par la queue.
- Il est formidable, celui-ci ! reconnut le pique-bœuf.
Les deux échassiers s’envolèrent à tire-d’aile. Un peu plus loin, ils se séparèrent : l’un alla encore chercher un sauveur, l’autre, ruminer sa défaite sous le fanon d’un zébu.
Quelque part, le héron rencontra un corbeau. L’oiseau noir fut disposé à lui porter secours. Ils s’envolèrent en direction de l’arbre sur la branche duquel était construit le nid. A leur arrivée, le corbeau demanda de l’extérieur :
- Qui est chez le héron ?
Le coucou répondit :
- C’est moi le coucou aux yeux rouges,
Moi qui parviens à maîtriser le caïman de Menarandra,
En le saisissant par le thorax.
Qui parviens à maîtriser le caïman de Menakompy,
En la saisissant par la queue
- Il est terrible, celui-ci ! admit le corbeau.
L’échassier et le passereau s’envolèrent à tire-d’aile. Un peu plus loin, ils se quittèrent : l’un toujours à la recherche d’un sauveur, l’autre partant se consoler de sa défaite dans un champ d’arachides désert.
Quelque part, le héron rencontra un faucon.
- Je suis très fort, dit le faucon en apprenant les nouvelles du héron. Il suffit que j’apparaisse pour que les poulets de tout un village prennent la fuite. Mon plongeon éclair sème la panique. Allons-y !
Lorsqu’ils parvinrent au nid, l’oiseau de proie demanda de l’extérieur :
- Qui est chez le héron ?
- C’est moi le coucou aux yeux rouges,
Moi qui parviens à maîtriser le caïman de Menarandra,
En le saisissant par le thorax.
Qui parviens à maîtriser le caïman de Menakompy,
En la saisissant par la queue
Il est redoutable, celui-ci ! avoua le faucon.
L’échassier et le rapace s’envolèrent à tire-d’aile. Un peu plus loin, ils se dirent « au revoir » : l’un se mit en quête d’un autre sauveur, l’autre alla se consoler en enlevant un poussin dans un village.
Quelque part, le héron rencontra un caméléon.
- On y va ! s’exclama le caméléon en apprenant les nouvelles.
Mais le caméléon marchait très lentement. Ses pattes courtes de reptile ne lui permettaient que de ramper nonchalamment.
- Un peu plus vite, mon grand frère, s’impatienta le héron.
- Je progresse malgré ma lenteur, répondit le caméléon.
Il leur fallut deux jours pour atteindre la demeure du héron. A leur arrivée, le caméléon demanda de l’extérieur :
- Qui est chez le héron ?
- C’est moi le coucou aux yeux rouges,
Moi qui parviens à maîtriser le caïman de Menarandra,
En le saisissant par le thorax.
Qui parviens à maîtriser le caïman de Menakompy,
En la saisissant par la queue.
- Qu’est-ce que tu dis ? s’écria le caméléon en entendant qu’on s’en prenait à ses frères reptiles.
Pan ! Pan ! Le caméléon tira sur le coucou. Deux coups de feu partirent et l’oiseau tomba, mort…
Contes et légendes Tandroy
SAMBO adaptation Olivier BLEYS
L’Harmattan