Conte: Le Fody (le cardinal).

Publié le par Alain GYRE

 

Le fody (le cardinal).

            Il y avait dans un coin de Madagascar un couple de vieillards qui gardaient une rizière. Le vieux, battant un vieux bidon, parcourait les champs ; sa femme le suivait en criant : « Hosy, hosé ! ». cela ne faisait pas mourir les oiseaux : jamais ces vieux n’usaient de pièges ni de sarbacanes car ils vénéraient les cardinaux.

         Le riz est, semble-t-il, l’une des dernières inventions de Dieu. Les hommes avaient faim, et puisqu’ils ont été placés sur terre, avec ordre de ne jamais monter au ciel, ils demandèrent aux cardinaux, qui ont des ailes, d’intervenir auprès de Dieu. La mission fut remplie avec zèle. Dieu envoya des grains que les hommes semèrent. La famine cessa.

         Mais ici se pose une question que personne encore n’a pu éclaircir.des hommes prétendent, en général, que les grains de riz ont été cédés à leurs ancêtres sans que les cardinaux, simples commissionnaires, aient eu droit à aucune part. voilà pourquoi ces oiseaux, quand ils mangent les grains de riz, sont jugés comme de grands voleurs et qu’il est juste de les supprimer. Nos deux vieillards, eux, jugeaient différemment. A leur avis, le riz appartenait aux « cardinaux » : Dieu le leur avait cédé. Mais les oiseaux, incapables de le cultiver, en avaient confié le soin aux hommes. Ceux-ci ne sont donc que les métayers des « fody » et ils n’ont qu’au tiers de la récolte. Les oiseaux ont toute liberté d’en manger les deux tiers. Nos deux aimables vieillards se contentaient donc de chasser leurs propriétaires par des cris. « Hosy, hosé » signifie d’ailleurs :allez-vous-en, ne piétinez pas le sol. La seule raison valable d’éloigner les volatiles trop gourmandes des grains, c’est qu’ils piétinent le sol.

         Il n’y a, heureusement, que deux vieux fous parmi nos paysans malgaches (1).

 

 

(1)    A l’heure actuelle, il n’y a plus de confusion dans l’esprit du Tsimihety : les fody n’ont droit à aucune part, et s’ils mangent des grains, ils méritent qu’on les jette dans les marmites. Dans ce cas, que voulait dire « Hosy, hosé !» ? En admettant que le terme « Hosé » soit la contraction de « Hoseky », on pourrait admettre que le sens véritable qu’on pourrait donner à ces deux mots est : « allez-vous-en, autrement je vous foulerai de mes pieds » ou pour employer nos expressions actuelles : « Partez tout de suite si vous ne voulez pas que je vous écrase ».

 

 

 

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RABEARISON

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