Reliure : Les Raboana magiciens des pages
Reliure : Les Raboana magiciens des pages
Marcellin Raboana fait partie de la troisième génération à avoir utilisé la presseuse de la famille dans ce travail
Depuis presque un siècle, une lignée d’artisans redonne vie aux livres anciens ou à relifter avec des techniques séculaires. La famille Raboana est connue ici et ailleurs.
Les livres doivent beaucoup à la famille Raboana. À Ambondrona, tout le monde la connaît, cette grande famille, originaire d'Ambohitrombihavana, qui redonne vie aux bouquins. « Nous sommes de la troisième génération », annonce Marcellin Raboana, accoudé à une presseuse ayant sûrement l’âge de son arrière grand-père.
Des machines comme cela, il y en a trois dans l’atelier principal de la famille Raboana. Héritées des « ancêtres », encore en état de marche, et surtout le garant suprême de la qualité du travail de la famille Raboana. Au pied de la petite montée pavée qui se dirige vers l’Ekar Faravohitra, depuis l’ancien dance hall pour adolescent Amnésia, trois ateliers de famille trônent, immanquables et toujours occupés. Un artisan chauffe du cuivre pour appliquer les lettres dorées sur une Bible. Un autre reçoit un client flanqué d’une épaisse rame de pages désordonnées. Un troisième classe les cuirs ou crée un semblant d’ordre dans ce fatras indéchiffrable. « Un jour, un client étranger nous a amené un livre assez rare, daté des années 1890 », relance Marcellin Raboana.
Famille livresque
Trois générations, toujours la même technique. Des fois, on a l’impression de se trouver devant un patrimoine familial inébranlable, digne des grands producteurs de whisky pur malt d’Ecosse. Un savoir-faire que la famille Raboana, sans trop de jalousie, se transmet de père en fils ou à des connaissances. Comble de l’ironie, personne n’est écrivain ou, au grand maximum, artiste dans la lignée. « Nos fils et nos filles commencent à s’intéresser à la reliure, ils ont environ douze ou quinze ans », avoue fièrement Marcellin Raboana.
Les clients des relieurs d’Ambondrona sont depuis, entre autres, Latimer Rangers, un bon voisin, selon William. « Il faisait souvent des reliures pour ses anciens journaux. Il était très aimable », se rappelle-t-il. Des littéraires, des personnalités de tout horizon, la famille Raboana connaît à peu près tout de leurs goûts littéraires. Chez eux, le livre se relie entre 36 000 et 18 000 ariary en deux jours, au maximum. Cela dépend de la matière utilisée et des goûts du client. Souvent, ce dernier est aussi satisfait qu’un enfant devant un sapin de Noël.
Maminirina Rado
Jeudi 07 mars 2013
L’Express