Sambava – La production de la vanille en danger
Sambava – La production de la vanille en danger
Les gousses de vanille verte sont, cette année, de bonne qualité
04.06.2014
L’Etat a fixé la date d’ouverture de la campagne de la vanille au début du mois de juillet. Une décision qui risque de compromettre une production qui s’annonce exceptionnelle en quantité comme en qualité.
L’État semble largement dépassé par la situation de la vanille dans la région SAVA (Sambava, Antalaha, Vohémar, Andapa). La date du 1er juillet, arrêtée par le ministère du Commerce et de la consommation pour débuter la campagne 2014, décale de très loin avec la réalité sur le terrain. Alors qu’il reste encore un mois avant l’ouverture fixée officiellement, les gousses de vanille verte se détériorent déjà dans les champs, faute d’être récoltées. Leurs extrémités commencent à se fendre, ce qui risque de leur faire perdre toute valeur commerciale.
C’est le cas, par exemple, dans la commune de Bemanevika qui est la plus grande zone productrice dans le district de Sambava, voire dans tout le pays. Ce qui représente près de 500 tonnes de vanille verte qui font certainement partie des meilleures qualités de Madagascar.
«Mes gousses de vanille sont arrivées à maturité depuis au moins deux semaines et je constate avec inquiétude que la quantité qui se détériore sur place, augmente de jour en jour. Je ne comprends pas pourquoi l’Etat a choisi cette date », se désespère Flav, un planteur de Bemanevika.
La vanille nécessite entre huit et neuf mois pour arriver à maturité à partir de sa floraison. Logiquement, la détermination de la date d’ouverture de la campagne, même si c’est une prérogative qui revient au ministère de tutelle, devrait se baser sur cette analyse technique. En outre, la période de floraison peut différer d’une zone à l’autre, même si elles se trouvent dans la même région, puisque tout cela est lié au climat et/ou à la situation géographique.
Dans le cas de SAVA justement, la floraison a commencé dès le début du mois de septembre 2013 pour les zones de production proche du littoral, entre autres, Sambava et Antalaha. Ce qui explique que la vanille arrive à maturité en ce début du mois de juin, sinon à la fin du mois de mai dans certains endroits comme Bemanevika. Ce n’est pas le cas pour Andapa qui se trouve à l’intérieur des terres et sur une zone montagneuse.
Il est donc évident que la période de maturité et, de ce fait, la date d’ouverture de la campagne ne peuvent pas être les mêmes pour ces zones. D’ailleurs, auparavant cette différence a toujours été prise en compte, avec l’adoption de deux dates différentes pour les zones littorales et pour celles qui se trouvent à l’intérieur des terres.
Des planteurs pénalisés
«Dans la situation actuelle, la date du 1er juillet correspond davantage à l’ouverture de la campagne à Andapa où la floraison n’a commencé qu’au mois d’octobre. Cette date ne peut donc pas être généralisée à l’échelle nationale », explique sous couvert d’anonymat un technicien de la filière.
Pour en revenir aux planteurs qui sont les premiers à être fortement pénalisés par la situation qui se présente, ils sont complètement asphyxiés. Le mois de juin est consacré à la campagne de la vanille verte, c’est-à-dire qu’ils vendent une partie de leur production non préparée pour gagner un peu d’argent en vue de la fête nationale. D’autres producteurs n’ont tout simplement pas les moyens humains et logistiques pour préparer et stocker leurs produits et sont également obligés de vendre de la vanille verte.
Aujourd’hui, avec l’ouverture tardive de la campagne, tous deviennent facilement des cibles très vulnérables pour les spéculateurs qui leur proposent d’acheter au noir et à des prix très bas leurs produits. Une autre menace guette également les planteurs, car les vols de vanille sur pied, dans les plantations, sont fréquents. Ce qui les oblige à monter la garde en permanence. «Nous sommes fatigués », se plaint l’un d’eux.
Toutes ces incertitudes tombent à une période où la filière vanille a une meilleure perspective, pour la première fois cette année après une décennie de crise. A commencer par la qualité de la production avec des gousses de vanille qui atteignent facilement vingt centimètres, du jamais vu depuis très longtemps. Le contexte du marché à l’exportation est également favorable avec la hausse des demandes de vanille naturelle par des industriels. La conséquence en est évidemment la hausse des prix qui devrait profiter à Madagascar, la Grande île fournissant plus de 80% des besoins mondiaux.
Mahefa Rakotomalala
L’Express