Poème: Gratitude - Ramambason

Gratitude
Hommage aux Missionnaires
Il est des hommes sur la terre
Qui s’en vont loin,
Mais que le prurit des affaires
Ne touche point :
Nul appétit vorace
De gain ne les tracasse.
Ils vont, abandonnant repos,
Mère et patrie,
Vers des pays où des drapeaux
D’idolâtrie
Tenaces sont hissés
Sur des morts entassés.
Il est des hommes dans le monde
Qui vont là-bas
Au loin. L’ombre immense est profonde,
Mais jamais las,
Chantant, ils lui résistent
Dans ces pays si tristes.
Ils vont et luttent chaque jour,
Et la souffrance
Ayant régné tout alentour,
Et l’ignorance,
Toujours s’affaiblissant
Sous leur effort puissant,
Et les fléaux de toutes sortes,
Tremblent de peur
En pressentant que ce que portent
En eux ces cœurs
Vaillants mettra en pièces
Leurs noires forteresses.
Nul ne sait, nul ne peut entendre
Tout ce qu’ils ont
Au fond du cœur, ou bien comprendre
Pourquoi ils vont,
Si l’on est sans connaître
Ce que l’homme peut être.
L’homme est-il un simple robot ?
Est-il sans âme ?
N’y a-t-il pour lui rien de plus beau
Que l’or, la femme,
Le vin ou le pouvoir ?
N’a-t-il pas des devoirs Impérieux, sacrés et nobles ?
Et c’est pourquoi,
Dans les bouges les plus ignobles,
Vivant de Foi,
Prêchant l’Amour céleste,
Ces hommes vont et… restent.
Ils restent, s’usant à la tâche,
Pour le païen ;
Ils s’usent faisant d’un Malgache
Un bon chrétien ;
Le terme de leur vie
Est bien digne d’envie.
Ils sont les hommes clairvoyants
Dont les richesses
Ne sont que pour les seuls croyants,
Et ce qu’ils laissent
Ne saurait s’acheter :
Amour, Éternité.
Ramambason
24.04.45
« Que sont-ils venus faire ici ? » est d’abord le titre choisi par l’auteur avant de devenir « Hommage aux Missionnaires ». L’emprise du christianisme sur l’auteur ne laisse aucun doute. Il ne devrait exister que des peuples chrétiens sur terre, d’après le poème. Toute religion en dehors du christianisme est considérée comme un fléau. La vision de monde du poète est très tendancieuse jusqu’à affirmer que seule la foi chrétienne peut conduire l’humanité au bonheur. Ses idées épousent parfaitement celles des missionnaires qui ne croient à la réussite de l’évangélisation qu’en passant par la scolarisation. En outre, il bannit, de toute évidence, la culture traditionnelle reposant sur le culte des ancêtres.
https://journals.openedition.org/oceanindien/1400#tocto3n6