Conte: IAF0LAV1TRA ADULTÈRE

IAF0LAV1TRA ADULTÈRE
Fabliau Tanala
Recueilli dans la région de l'Ikongo (province de Farafangana).
Ifaranimahery, s’en allant en expédition, rencontra, dit-on, une femme enceinte et lui dit :
« O mère, je m’en vais à la guerre. Quand vous mettrez un enfant au monde, il sera mon frère, si c'est un garçon, et, si c’est une fille, elle sera ma femme. »
La femme consentit, et au bout de quelques mois mit au monde une fille.
Bientôt Ifaranimahery vint la voir et déclara que l’enfant était sa femme. Puis il tua un bœuf, donna beaucoup de vêtements à sa jeune épouse et partit de nouveau.
Cependant la fille grandit.
Quand elle fut nubile, comme son mari n’était pas revenu encore, elle dit un jour :
« Ma mère, pourquoi ne me demande-t-on pas en mariage?
C’est parce que tu es mariée.
- Où est mon mari ?
- Il est allé faire le commerce au loin depuis des années. C’est au moment de ta naissance qu’il était ici.
- Comment s’appelle-t-il, ma mère ?
- Il a nom Ifaranimahery. »
La jeune fille prit encore patience quelque temps, puis elle se lassa d’attendre en vain son mari. Elle se sauva de la case de sa mère, car elle avait un ardent désir de se marier, et elle se rendit au village du roi Indrianonibe.
Quand il la vit si belle, le roi lui demanda d’être sa femme.
« Volontiers, dit-elle, je serais très heureuse de vous épouser, cependant je dois vous faire un aveu : on dit que depuis ma naissance je suis la femme d'Ifaranimahery.
- Alors, malgré l’amour que je ressens pour toi, je te prie de m'excuser, Ramatoa, mais je ne veux pas prendre la femme d’un autre. »
Elle s’en alla et arriva bientôt dans le village du roi Iafolavitra.
Frappé de sa beauté, celui-ci s'écria :
« Je veux que tu sois ma femme. »
- Moi aussi, je le veux bien, dit la jeune fille, mais je dois te faire connaître que je suis depuis ma naissance épouse de Ifaranimahery.
- C’est bien ce que dit le proverbe.
- Quel proverbe ?
- On ne saurait se chauffer à un feu éloigné. »
La jeune fille accepta donc de devenir la femme d'Iafolavitra.
Malheureusement, Ifaranimahery vint à savoir qu’un autre avait pris son épouse, et il se prépara à la reconquérir.
Iafolavitra, de son côté, convoqua tous ses gens pour la guerre.
La lutte s’engagea bientôt, mais tous ceux qui lançaient leurs sagaies contre Ifaranimahery,tombaient morts, aussitôt que celui-ci les regardait. Les survivants s'empressèrent de fuir.
Iafolavitra fut vaincu et tué, et son royaume passa aux mains d'Ifaranimahery, qui retrouva en même temps sa femme.
C'est à partir de cette époque, dit-on, que personne ne veut plus prendre l’épouse d’un autre.
Contes de Madagascar
Charles RENEL