Conte: L’origine du mot « Nouvelles »

Publié le par Alain GYRE

L’origine du mot « Nouvelles »

 

Aux jours d’autrefois, dit-on, les gens étaient très malheureux, il y avait des maladies de toutes sortes. Et les gens mouraient les uns après les autres. Alors ils consultèrent la géomancie.

Et le géomancien leur dit :

- Envoyons un ambassadeur, qui ira trouver Dieu, pour chercher le remède contre la mort.

            Alors ils dépêchèrent un ambassadeur.

            Il partit. Et cet homme qu’ils avaient envoyé s’appelait Nouvelles. Et ce Nouvelles arriva chez Dieu. Et c’était un homme très sage, le plus sage du village. Et dieu dit :

- Toi, je ne t’autorise plus à repartir, parce que je connais ta grande sagesse. Parmi tous mes sujets, tu es le seul à être aussi sage.

            Les choses ayant tourné ainsi, Nouvelles n’avait pas obtenu le remède, puisque Dieu l’avait retenu. Les autres, au village, en étaient bien embarrassés.

- Voilà que les maladies nous frappent, que la mort devient de plus en plus fréquente. Qu’allons-nous faire ?  Nouvelles n’est pas revenu.

- Eh bien, dépêchons un autre ambassadeur.

            Ils envoyèrent un autre ambassadeur. Quand celui-ci fut arrivé, il dit :

- Ô Dieu, nous sommes venus te trouver pour te demander un remède contre la mort. Donne-nous un remède.

- S’il en est ainsi, répondit Dieu, voici : Le remède que je vous  donne exige de respecter un interdit, un seul ; vous devez vous abstenir de la natte. Même de prononcer son nom, cela vous sera tabou.

- Et qu’allons-nous faire des nattes que nous avons déjà chez nous ?

- Eh bien, dès que vous serez revenus là-bas, il faudra aussitôt les jeter toutes. Et même au moment où vous aller sortir toutes les nattes pour les jeter, vous ne pourrez déjà plus en prononcer le nom.

- C’est entendu, dirent-ils.

            Alors, l’envoyé revint sur terre, et il rapporta tout aux familles du village. Une fois arrivé au village, il leur répéta tout en détail.

            Les femmes du village se mirent alors à enlever toutes nattes, à les sortir des maisons. Et une fois toutes nattes enlevées ( parce que, dans les maisons d’autrefois, le sol était simplement en terre, qu’on recouvrait de nattes)…. Une fois toutes les nattes enlevées, il restait, chez une vieille femme, un tout petit sac en natte.

- Malheur, se dit-elle, il me reste mon petit sac.

            Elle rentra dans la maison en courant. Et, à ce moment, il leur était déjà interdit de dire le mot « natte » car toutes nattes avaient été jetées. Mais elle avait soulevé trop de poussière. La vieille éternua :

- : « Il n’y en a… tchoum ! (tsihe !), fit la vieille.

            Et voilà, elle avait dit le mot « natte » ( tsihy).

            Hélas ! Le remède avait perdu sa vertu. Tout était arrêté… Le remède qui aurait pu arrêter la mort avait perdu sa force, parce que la vieille avait dit le mot « natte ».

- Oh, notre remède ne vaut plus rien. J’ai dit « natte », reconnut la vieille.

            Elle avait fait « atchoum » (tsihe), c’était comme si elle avait dit « natte » (tsihy).

            Et c’est la raison pour laquelle jusqu’à présent, les gens continuent à mourir, à mourir sans cesse. La mort ne s’arrête jamais. Et quand les gens disent « Nouvelles », c’est qu’ils se souviennent de leur envoyé qui  était allé au ciel, de leur envoyé quyi s’appelait Nouvelles, qui était allé chercher le remède de vie éternelle, et qui n’est jamais revenu.

            C’est de là qu’est venue la tradition de demander aux gensqui arrivent : « Nouvelles ? Quelles sont les nouvelles ? » (Kabary ?). Car on espère toujours qu’ils apportent le remède de vie éternelle. Et on répond :

« Il n’y en a pas ! » (Tsisy e !). c’est la seule réponse à faire.

            C’est là l’origine du mot « nouvelles ».

 

           

Fulgence FANONY

L’Oiseau Grand-Tison

Et autres contes Betsimisaraka du Nord

Littérature orale Malgache

tome 1

L’Harmattan 

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