Conte: Le chat et le rat

Publié le par Alain GYRE

 

Le chat et le rat

Fable Tanala

Recueillie à Ifanadiana (province de Fianarantsoa).

Variante

 

Un chat et un rat, dit-on, se rencontrèrent un jour et lièrent amitié ensemble.

Comme ils avaient faim tous deux, ils décidèrent d'aller chercher de quoi vivre.

Bientôt ils arrivèrent à un champ de patates, auprès d’une rivière. Le rat se mit aussitôt à creuser la terre, et, sitôt qu’il eut trouvé une patate, il la mangea.

« Qu’est-ce que tu fais là, lui dit son camarade ?

- Je cherche du bois pour construire une pirogue, car j’ai entendu dire que là-bas, de l’autre côté de cette rivière, il y a beaucoup de nourriture.

- Très-bien, mon cadet, dépêche-toi de creuser, car nous avons grand faim. »

Cependant le rat continuait à se régaler de patates.

Quand il en eut mangé tout son saoul, il en apporta une très grosse à son camarade et dit:

« Voici, mon aîné, le bois que j’ai trouvé dans la terre. 11 ne nous reste plus qu’à creuser notre pirogue.

- Avec quoi la creuserons-nous ?

- Avec quoi ! c’est bien simple : avec mes dents.

Mais laisse-moi d’abord me reposer un peu », ajouta l’animal rusé; il avait tellement mangé, qu'il était lourd de sommeil.

Lorsqu’il se réveilla, il avait de nouveau faim :

« Allons, dit-il en s’étirant, je vais me mettre à la construction de notre pirogue, mon aîné.

- Oui, répondit le chat, car j’ai bien faim. »

Le rat se mit à ronger la patate, mais il l’entaillait régulièrement de façon à lui donner la forme d’une pirogue.

« Tu travailles lentement, mon cadet, disait le chat.

— Un peu de patience ! Voici qu’elle est finie. »

Tous deux s’embarquèrent, mais, quant ils furent à moitié de la rivière, le rat, qui tenait la pagaie, se plaignit d’être fatigué et s’arrêta sous prétexte de se reposer un peu.

Pour la troisième fois, il se mit à manger la patate, mais il rongea si bien la pirogue qu'il finit par la percer; elle prit l’eau et s’enfonça petit à petit dans la rivière.

Les deux compères se jetèrent à la nage ; le rat, repu et plein de force, gagna facilement le bord, mais le chat, épuisé de faim et de fatigue, faillit se noyer; et dans ces circonstances critiques, tandis qu’il luttait contre le courant, il s’écria plein de colère :

« Que celui de mes descendants qui ne poursuivra pas le rat pour le manger, soit maudit, car cette maligne hôte m'a presque fait mourir ! »

Voilà pourquoi, depuis ce jour, les chats mangent les rats.

 

Contes de Madagascar

Charles RENEL

 

 

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