Nouvelle: Origine et nature des ody - Charles RENEL
Mes amulettes malgaches
CHAPITRE II
Origine et nature des ody
Quelques notions sur les idées religieuses les plus générales des Malgaches sont indispensables pour préciser l'origine et la nature des ody(l). Toi/tes les croyances des indigènes de l'île, peut-on dire, reposent sur le culte des ancêtres, fondé lui-même sur la survie. L'âme, le souffle, l'esprit, c'est-à-dire le double immatériel que l'homme est supposé posséder, continue d'exister après la mort : cet avelo, comme disent les Malgaches, éprouve même quelque peine à se séparer de son corps. Telle la psyché des Grecs, comme l'explique Platon dans le Phédon, ne se décide pas facilement à quitter le cadavre et durant de longs jours erre dans le voisinage du tombeau. Tel aussi l'avelo, selon les Imériniens, peut être rappelé parfois dans le corps momentanément abandonné, ou bien après la mort demeure longtemps dans le tombeau, ou encore se fixe en un arbre ou un rocher proche, et hante, sous forme de matoatoa, la case habitée par les survivants.
Les esprits des-morts sont tantôt malveillants et malfaisants, tantôt au contraire bienfaisants et capables de protéger ou d'aider leurs parents et leurs amis. Il est donc nécessaire pour les vivants de rester en relations avec eux et de se les concilier, si possible, par des prières et des offrandes. Certains hommes ont une disposition particulière pour entrer en communication avec les ancêtres morts : ceux-ci leur revèlent, soit en songe, soit dans une sorte de délire prophétique ou par une espèce de possession à l'état de veille, les rites à accomplir.
Le nom générique de razana (ancêtres) est appliqué aux esprits des morts ; mais on les connaît encore sous d'autres appellations. Les angatra ou les angabe, le plus souvent méchants et redoutables, sont invoqués de préférence par les sorciers. Les lolo, qui habitent les profondeurs des rivières ou des lacs, sont aussi un objet de terreur pour les hommes. Les Vazimba hantent les amas de pierres pareils à des tombeaux, les rochers, certains coins de forêts ; la croyance commune en a fait les esprits des plus anciens habitants des Hauts-Plateaux, chassés et dépossédés à l'aurore des temps par les Imériniens. Ils sont tantôt nocifs, tantôt secourables ; parfois ils tordent le cou de ceux qui foulent l'herbe de leur domaine, ou envoient une maladie à quiconque viole l'une de leurs interdictions ; mais plus souvent ils exaucent les vœux de ceux qui les prient ou leur promettent des sacrifices. Les Angalampona, les Anahandriana ou Ranakandriana sont plus vagues encore ; on ne leur connaît pas, comme aux Vazi1nba, de postérité parmi les hommes ; aussi ne saurait-on affirmer que ce sont des ancêtres, et pourtant la croyance populaire ne fait guère de distinction entre eux et les Vazimba. D'autre part les Anahandriana sont des Andriamanitra, comme l'indique le texte suivant du Tantara (2) : « Ces Anakandriana. n'étaient ni hommes ni bêtes, mais des Êtres (zavatra) qu'on ne connaissait pas ; ceux qui pouvaient en savoir quelque chose les reconnaissaient à leur voix : c'étaient les gens possédés par eux. Des cavernes étaient leurs demeures, à l'est d'Ambohitsara, et à Fandana, à l'est d'Ambohimanambola, eto,
Ces demeures étaient fréquentées par de très nombreuses personnes venant y faire des suppliques, des prières et des hasina en argent. Nombreux étaient les gens possédés par les Anakandriana dans leurs cavernes, et ces possédés devenaient mpisikidy et mpitahiry sampy, et connaissaient les rites. Car les Anakandriana leur faisaient prendre les choses appelées sikidy ou appelées sampy. Le Ranakandriana n'est pas visible de façon à être conservé, et on ne peut lui rendre de culte, parce qu'on ne voit pas son corps ; pourtant c'est un zavatra pourvu de souffle et à qui s'adressaient les prières des anciens. La prière aux Ranakandriana est la suivante :
« Andriamanitra mâles, Andriamanitra femelles, Zanakandriamanitra mâles, Zanakandriamanitra femelles, Zanahary mâles, Zariahary femelles, vous tous dont les noms sont connus et dont on n'aperçoit pas la forme, venez! » (3).
Les Anakandriana .(4), identiques d'après cette invocation aux Zanakandriamanitraî, seraient donc la postérité des Andriana ou des Andriamanitra,, c'est-à-dire la lignée des ancêtres royaux divinisés.
Cette hypothèse est confirmée par un passage de Flacourt : « C'est en cette province (Fanjahira, au nord-ouest de Fort-Dauphin) qu'habitent les blancs qui y sont venus depuis 150 ans et qui se nomment, Zafferamini. Ils sont divisés en trois conditions ou états, savoir en Rohandrian, Anakandrian et Ondzatsi ; les Rohandrian sont ceux dont ils tirent leur roi ou Grand. Les Anakandrian sont ceux qui sont sortis d'un Rohandrian et d'une femme qui est ou d'entre les noirs ou d'entre les Anakandrian ou les Ondzatsi ; ils ont tous la peau rouge et les cheveux longs, point ou peu frisés comme les Rehandrian ; ces Anakandriana, aussi bien que les Rohandrian, ont l'avantage de pouvoir couper la gorge aux bêtes. »
Tous, angatra, lolo, Vazimba, Anakandriana, se confondent aussi sous le nom générique de zavatra ou de zava-masina (5), et ce terme comprend même les Zanahary, les Andriamanitra et les Andriananahary, dont il sera question, un peu plus loin. Zavatra signifie en malgache « chose » et aussi « être ». Cette doubleacception apparaît très bien dans les mots composés comme zava-maneno (objets qui résonnent, instruments de musique), zava-maniry (choses qui poussent, les plantes), zava-miaina (êtres qui ont le souffle, les animaux). De même zava-masina signifie les êtres qui ont le hasina, les êtres sacrés (6). Et le mot zavatra désigne très fréquemment les êtres indéfinissables et invisibles qui errent autour de l'homme, surtout dans l'ombre de la nuit, ou dans les solitudes, les êtres mystérieux dont l'imagination humaine, sous toutes les latitudes, a peuplé le monde.
Enfin les Malgaches appellent Zanahary, Andriamanitra, Andriciiianahary, d'autres êtres, zavatra et zava-masina comme les précédents, mais paraissant à première vue se distinguer des ancêtres. Avec nos habitudes de pensée et de langage, nous nous trouvons amenés presque naturellement, nous autres Européens, à traduire ces mots par « dieu » ou « dieux ». Les premiers explorateurs et voyageurs, influencés par leurs idées chrétiennes, ont déclaré que les peuplades de Madagascar, non converties encore, croyaient cependant à une divinité suprême appelée Andriamanitra ou Andriananahary. Les missionnaires ont vu là une preuve du monothéisme primitif. des Malgaches, ou tout au moins de leur tendance évidente à n'adorer qu'un dieu unique.
Je ne puis partager cette opinion. Pour moi, les Zanahary, les Andriarnanitra, les Andriananahary sont des zavatra, des êtres analogues aux Angalamponaaux Yazimba ; par suite, ils ne se distinguent pas des razana, et ils sont aussi des ancêtres, si vagues et si lointains qu'on a oublié leur filiation, mais d'autant plus redoutables et plus vénérés qu'ils semblent plus inconnus et plus mystérieux. Le Malgache appelle razana (ancêtres) les morts proches dont les cadavres reposent dans les tombeaux, ou ceux dont le souvenir s'est au moins gardé, avec les noms, dans la mémoire des hommes ; et il nomme zavatra ou Zanahary les morts dont on ne se rappelle plus ni les noms, ni les visages, ou les morts des autres clans qui ne sont point des ancêtres au sens strict du mot. Mais tous sont des hommes d'autrefois, des Ancêtres au sens large. Telle est bien la croyance populaire imérinienne: Un de mes amis malgaches, Tananarivien et appartenant à une famille devenue protestante, me rapportait ce souvenir de son enfance : jadis, quand il était tout petit, bien avant l'occupation française, sa grand-mère, restée païenne, gourmandait devant lui ses parents devenus chrétiens : « Vous allez, disait-elle, prier Jehovah et Jésus-Christ qui sont les ancêtres (razana) des chrétiens ; mais nous, nos ancêtres sont Andriamanitra et Andriananahary. »
L'absence de singulier et de pluriel dans les dialectes malgaches a facilité la confusion d'Andriamanitra avec le « dieu » des chrétiens. Dans la plupart des cas en effet on ignore si le terme malgache désigne un ou plusieurs êtres, et on peut le traduire aussi bien par le singulier que par le pluriel. Je ne nie pas d'ailleurs que la conception chrétienne n'ait eu une grande influence sur l'emploi actuel de ces mots et que la majeure partie des Imériniens d'aujourd'hui ne les emploient réellement au singulier dans leurs formules. Une propagande intense est faite depuis très longtemps à Madagascar par les diverses missions, et l’Imerina centrale est nominalement convertie depuis deux générations (7). C'est donc dans les vieilles prières imériniennes et dans les documents modernes betsimisaraka ou sakalava qu'il faut chercher la solution du problème. Or voici ce qu'on y découvre : dans beaucoup de cas on peut hésiter entre le singulier et le pluriel, mais par contre, dans de très nombreux exemples, le contexte marque nettement que Zanahary, Andriamanitra, Andriananahary sont des pluriels, soit qu'un mot tel que ireo l'indique, soit qu'on invoque nommément les Andriamanitra masculins et les Andriamanitra féminins, les Zanahary de l'est et de l'ouest, du nord et du sud, ceux qui sont près, et ceux qui sont loin. Des preuves analogues sont fournies par le Tantara ny Andriana du P. Callet, recueil de-documents imériniens antérieurs à la conquête (8).
D'autre part on traduit généralement Andriamanitra, Andriananahary, comme deux épithètes, deux appellations d'un même être; je crois qu'il faut y voir plutôt deux catégories d'êtres, voisines l'une de l'autre et réunies parfois sous une même invocation, comme ailleurs les lolo et les angatra, ou les Vazimba et les angalampona, ou les Anahandriana et les VazÎ1nba.
Mais j'en arrive à l'explication même des mots qui passent pour désigner la divinité chez les Malgaches.
Le sens de Zanahary (9), est donné, à mon avis, par la formule qui revient constamment dans les prières des peuples de la côte : Zanahary naTiary tongotra aman-tanana (les Zanahary qui ont fait les pieds et les mains). La racine hary signifie créer, procréer, acquérir ; nahary est la forme du passé. L'élément initial za reste assez obscur : on l'a rapproché, non sans vraisemblance, du même élément dans les mots za-tovo, za-l'aliy, za-vavy ; il serait alors une sorte de préfixe (10) emphatique comparable à Ra dans les noms propres, et Zanahary signifierait simplement « celui qui a créé ou procréé. » Ainsi encore les Zanahary seraient les pères d'une lignée, les ancêtres.- Dans la langue courante mahary s'emploie bien avec ce sens de procréer ; on dit par exemple : tsy inbola « nahary » zaza izy rfiivady (ces deux époux n'ont pas encore procréé, n'ont pas eu d'enfants). Ajoutons enfin que peut-être l'expression Zanahary-nahary tongotra aman-tanana (le Procréateur créateur des pieds et des mains) pourrait être éclairée par le rapprochement avec des contes malgaches fort nombreux où un Zanahary est représenté comme ayant modelé avec de la glaise ou sculpté dans du bois des statues à forme humaine. Mais il est incapable à lui seul de les animer, de leur donner le souffle et il se fait aider dans cette tâche soit par un autre Zanahary, soit par la fille du grand Zanahary, devenue sa'femme. Il devient ensuite le père de la lignée humaine, le grand Ancêtre, par les enfants que lui donne soit la fille du Zanahary, soit les femmes-statues prises par lui comme petites-épouses (vady hely.).
Andriananahary a le même sens que Zanahary. Le premier élément du mot, Andriana, signifie chef au sens le plus large, c'est-à-dire soutien, maître, protecteur.
Dans toute l'île, il sert à désigner les hommes de caste noble et surtout royale.
Andriananahary serait donc le chef procréateur de la race, le premier ancêtre royal.
Dans les anciens contes, le roi s'appelle Andriambahoaka, le protecteur du peuple, ou Andriana tout court. Et c'est ainsi qu'on désigne le roi des Imériniens dans les récits d'autrefois. On le proclamait aussi le Zanahary de ses sujets, comme il est dit dans un chant (11) rituel, chanté dans beaucoup de cérémonies :
Notre Andriana ! C'est un bon Andriana !
Notre Andriana ! C'est notre soleil !
Notre Andriana ! C'est notre Zanahary !
Les ancêtres des Andriana étaient donc les Ancêtres par excellence, ceux à qui tout le peuple devait rendre après leur mort un culte d'autant plus dévot qu'il vénérait déjà pendant leur vie ces « dieux descendus sur la terre », ou ces « dieux visibles » (12). La confusion entre les Ancêtres des Andriana et les Andriamanitra était si naturelle dans la croyance populaire qu'elle a trouvé son expression dans une légende. Celle-ci peut n'être pas très ancienne, mais elle est intéressante à plus d'un titre. Elle fait remonter l'origine de la dynastie imérinienne à une fille d'Andriamanitra, tombée du ciel sous la forme d'une feuille d'arbre parfumée, puis changée en femme et devenue l'une des épouses d'Andrianerinerina (13). De ce mariage naquit Andriananjavonana, le dix-septième aïeul d'Andrianampoinimerina.
Enfin une cérémonie magique, très en honneur actuellement à Madagascar, celle du tromba (14), nous fournira une dernière preuve de l'identité des ancêtres et des dieux, des razana et des Zanahary. Le rite essentiel de cette cérémonie consiste en l'invocation d'un Esprit qui possède l'un des assistants et parle par sa bouche. Or c'est souvent l'âme d'un roi des temps passés ou d'un ancien ombiasy célèbre qui revient ainsi dans le corps d'un contemporain, et cet Esprit est appelé communément un Zanahary.
J'arrive au terme qui dans la langue malgache sert aujourd'hui à désigner le dieu des Chrétiens : Andriamanitra; c'est proprement le « Seigneur-Parfumé ». Epithète au premier abord un peu singulière ! Elle s'explique par certaines croyances dont les vieillards imériniens conservent encore la tradition. On disait autrefois assez couramment des cadavres qu'ils sentaient bon (manilra) au lieu de dire qu'ils sentaient mauvais' (maimbo), particulièrement lorsqu'il s'agissait de cadavres d'ancêtres conservés dans le tombeau de famille et quand par exemple on les 'sortait du tombeau à l'occasion du famadihana (15). Les mauvais Esprits, les Esprits malfaisants, sont encore appelés dans certaines régions maimbo, ceux qui sentent mauvais. J'ai trouvé cette appellation en usage dans maints villages du district d'Ambatondrazaka (pays sihanaka) et des provinces de Tamatave ou de Vatomandry (pays betsimisaraka). Il existe même une amulette pour protéger contre les attaques des Maimbo (16). A ces Êtres pourris et puants s'opposeraient donc les Êtres incorruptibles et parfumés, sous le nom d'Andriamanitra. Il est assez curieux qu'on trouve des idées analogies chez les anciens chrétiens : d'après les hagiographes, les cadavres des martyrs ne pourrissent pas et répandent au contraire une odeur exquise ; d'où l'expression devenue banale : mourir en odeur de sainteté.
L'incorruptibilité des morts les plus, vénérables, des Saints Razana, est aussi attestée chez les Malgaches par des proverbes (17), et surtout par les commentaires que savent encore en faire certains vieillards ; car les proverbes en eux-mêmes sont fort obscurs et il serait difficile d'en tirer parti sans exégètes indigènes.
Minia wiaty ho maimbo (18) signifie en mot à mot : il veut mourir pour sentir mauvais ; ce qui se commente ainsi : il s'obstine dans le mal, de sorte qu'étant mort il. sentira mauvais très vite. Car il semble que les morts dont la vie a été plus mauvaise, se pourrissent plus vite. Quand on remue les corps dans le tombeau, lors de la cérémonie du famadihana, on cherche à. se rappeler comment ils se sont conduits de leur vivant pour savoir s'ils seront ou non bien conservés.
Les Imériniens croient qu'après la première mort il y en a une seconde, beaucoup plus pénible. En se conduisant mal, on hâte la venue de cette seconde mort. Un des signes qui la décèlent probablement, disent certains Malgaches, c'est la mauvaise odeur répandue par les cadavres. Les Andriamanitra seraient donc en quelque manière les « immortels » de la conception grecque, ceux qui échappent à la mort complète (19). Autrefois on racontait encore à Tananarive que les restes d'Andrianampoinimerina et de Radama Ier son fils étaient particulièrement incorruptibles et ne répandaient aucune mauvaise odeur : ces deux grands rois, vivants ou morts, étaient des «Andriamanitra visibles» selon la formule malgache.
Ces brèves 'explications sur les zavatra, les razana, les Andriamanitra, ou, si l'on veut, sur. les Êtres, les Ancêtres et les Dieux, qui constituent une seule et même famille d'Esprits, étaient nécessaires pour aborder la question de l'origine des ody et des sampy.
(1) Ces notions, illustrées par des citations et des exemples nombreux, seront développéesen un volume qui paraîtra ultérieurement sous ce titre : Le culte des ancêtres chez les Malgaches.
Je ne fais que résumer ici très brièvement mes idées à ce sujet. N
(2) Tantara ny Andriana, 82 sq.
(3) Variante de cette prière, Tantara ny Andriana, p. 85 : Zanahary lahy, Zanahary vavy !
Andriamanitra any ambony, elanelari ny tany sy ny lanitra, Andriamanitra eto ambany, elanelan1 ny
tany sy ny olombelona! - -
(4) Anaka et Zànaka, en malgache, signifient tous deux « enfants ».
(5) Zava-inasina = zavatra masina, c'est-à-dire « être sacré », cc être saint ».
(6) On verra dans une autre partie de ce travail le sens précis de hasina, masina.
(7) Exactement depuis 1869, date de la conversion officielle de Ranavalona II au protestantisme.
(8) On trouvera, éparses en ce livre et surtout dans la deuxième partie, de nombreuses citations de ce genre pour ce qui concerne soit les Imériniens, soit les Sakalava et les Betsimisaraka ; il est donc inutile d'en faire étalage ici; je me contente de quelques citations imériniennes empruntées au Tantara ny Andriana du P. Callet.
87 .-Mangataka amindreo izahay Andriamanitra nanambatra tongotra aman-tanana, izay Zanahary nanao ny andro sy ny alina (Je demande à vous les Andriamanitra qui avez ajusté les pieds et
les mains, les Zanahary qui avez fait le jour et la nuit) ;
102 : Mangataka arninareo izay Andriamanitra sy Andriananahary sy ray razana (Je demande à vous les Andriamanitra, les Andriananahary et les pères ancestraux). Je cite ce texte, bien qu'on puisse à la rigueur faire ici d'Andriamanitra et Andriananahary deux singuliers, mais il reste intéressant, parce qu'il montre nettement qu'Andriamanitra et Andriananahary sont deux êtres distincts, en connexion étroite avec les razana (même relation syntaxique par l'emploi de la particule de coordination sy) ;
85 : Zanahary lahy, Zanahary vavy ! Andriamanitra eny ambony elanelan' ny tany sy ny lanitra!
Andriamanitra eto ambany elanelan: ny tany sy ny olombelona ! Zanahary mâles ! Zanahary femelles ! Andriamanitra là-bas en haut, entre le ciel et la terre ! Andriamanitra ici en bas entre la terre et les humains !
Même page : Ary misy Andriamani-daliy sy Andriamani-bavy, ka tsy sarahina ny fiantso azy. Et il y a des Andriamanitra mâles et des Andriamanitra femelles ; on ne les sépare pas dans les
azy. Et il y a Andriamanitra mâles et des Andriamanitra femelles ; on ne les sépare pas dans les invocations. •
84, 85. Ary ny hevitry ny'teo aloha, ny amin' ny Andriamanitra dia misy Andriamanitra lehibe,
tompori1 ny aina izay mahefa izao rehetra izao, ary ny Andriamanitra kely, ny sariipy Et la
pensée des gens d'autrèfois au sujet des Andriamanitra, c'est qu'il y a de grands Andriamanitral'
maîtres de la vie et qui peuvent toutes choses, et de petits Andriamanitra, qui sont les sampy.
(9) J'ai lu l'intéressante étude de M. G. Ferrand sur le mot Zanahary (Le dieu malgache Zanahary, brochure in-8", 18 pages, 1906), qui représenterait un ancien Yanahari, répondant au malais Yan-hâri ;
le sens serait : « dieu soleil, dieu du jour ». Je n'ai pas été convaincu par les raisons de M. Ferrand, fort ingénieusement présentées, mais uniquement philologiques : je me méfie, en ces matières, de la grammaire comparée, que j'ai beaucoup pratiquée autrefois.
(10) Le rôle de ces préfixes, qui. servent à former en malgache un grand nombre de mots, est encore assez mal connu. Citons les principaux : tsa, tsi, tso, va, to, so, P. Q , vo, ki, ko, ma, - ta, ka. Za, dans Zanahary, n'est pas plus extraordinaire que ka dankabesoka, kaboaka, kafotsy, kamahana, kamaitso, kamaosy, eto., 6u-que ta dans' tabebaka, taboaka, tabonaka, takositra, talelaka, tamora etc., ou que sa dans sabaka, sàfotaka, sakay, savesaka, etc:
(11) Tantara ny Andriana, 261, 362, 390. -
(12) Andriamanitra latsaka an-tany, Andriamanitra hita maso.
(13) Tantara ny Andriana, 11 et 13 (note).
(14) D’origine sakalava, et répandue aujourd'hui dans toutes les régions côtières.
(15) .Cérémonie qui consiste à retourner les morts, à lesxhanger de côté, en ajoutant de nouveaux linceuls de soie rouge à ceux dont ils sont enveloppés déjà. Un Imérinien au "courant des coutumes anciennes me disait que ceux qui entrent dans le tombeau, s'ils sont incommodés par la puanteur des cadavres,, doivent se. garder de dire que'« cela sent mauvais ».
(16) Voir Ody-maimbo, à Tanambao (Tamatave), et à Antokazo (district d'Ambatondrazaka).
(17) Ces proverbes m'ont été signalés par M. J. Paulhan, alors professeur au lycée de Tananarive, et à qui j'exposais un jour mon avis sur le sens du mot Andriamanitra. M. Paulhan m'a communiqué - en même temps lés commentaires qu'il avait recueillis.
(18) Ohabolan" nyNtaolo, par W.-E. Cousins, n° 1798.
(19) Proverbes relatifs à la seconde mort : maty indray mandeha leo ihany, fa ny fanindroany no tsy tanty (mourir une fois passe encore; mais c'est la deuxième fois qui est pénible). (Cousins, 1663). Cf : Aza miringiringy loatra ny filondran lena : fa ny îiiaty indray mandeha leo ihany, fa ny fanindroany no tsy tanty. (Cousins, 633).
LES AMULETTES MALGACHES
Ody et Sampy
par
CHARLES RENEL
PROFESSEUR-ADJOINT A LA FACULTÉ DES LETTRES DE LYON
DIRECTEUR DE L'ENSEIGNEMENT A MADAGASCAR