Conte: Un amour d’une sourde

Un amour d’une sourde
Il y a bien longtemps de cela, un homme riche nommé Rabevoninahitra avait épousé une femme nommée Ralango. Depuis leur jeunesse, ils voulaient avoir un enfant, mais rien ne venait. Un jour, alors que Monsieur Rabevoninahitra avait atteint l’âge de soixante-dix ans et sa femme cinquante, cette dernière dit à son mari qu’elle était enceinte, et quelques mois plus tard ils eurent un garçon : jamais ils n’avaient été aussi heureux que ce jour-là.
Les années passèrent, l’enfant grandit, tous les gens du village l’appelaient Tsiory (ce qui veut dire « monsieur qui manquait de rien », car il était le fils unique du richissime).
Un jour, Tsiory partit se promener dans la forêt, et au cœur de cette forêt, il découvrit une petite cabane où se trouvait une jeune fille sourde qui vivait seule, personne ne voulant vivre avec elle, même pas ses propres parents.
Tsiory la trouva très belle, mais il n’osait pas lui parle de son amour. Dès lors, il n’y eut pas de matinée où l’on ne vit Tsiory aller à la cabane, rejoindre sa belle. Il était amoureux de Felana, la fille sourde, mais il n’osait pas encore lui déclarer son amour.
Un matin qu’il arrivait au cœur de la forêt comme d’habitude, il trouva la cabane brûlée, il chercha partout Felana. Il cria son nom mais personne ne lui répondit.
Il resta là toute la matinée, criant, pleurant, et il revint chaque jour mais en vain. Un matin de l’été de cette année, elle apparut soudain au milieu de la cabane et tendit la main vers Tsiory qui décida aussitôt de l’épouser ; elle accepta, ils furent heureux et eurent beaucoup d’enfants.
Mais bien des années plus tard, un jour, Felana retourna à sa cabane dans la forêt avec la robe qu’elle portait le jour où elle lui apparut pour la première fois. Mais cette fois, ce fut pour disparaître à jamais. Son mari tenta de la suivre, mais il ne put rien faire.
Depuis, chaque matin, espérant la voir à nouveau. Et maintenant, dans cette forêt appelée Garafantsy, on entend toujours la voix de Tsiory crier et pleurer, surtout le matin.
Ce conte est un conte, ce n’est pas moi qui invente, ce sont les ancêtres qui le transmettent..
Meltine Nirintsoa
Angano
Contes et histoires de Madagascar
Recueillis, traduits et adaptés par
Bernard et Monique CLAVERIE
Lettres de l’Océan Indien
L’Harmattan