L’Exposition de 1931 bercée par les chœurs malgaches

Publié le par Alain GYRE

L’Exposition de 1931 bercée par les chœurs malgaches

19.12.2016 Notes du passé

 

Le Musée permanent de la France d’Outre-mer, garde le prestige de l’Exposition internationale de 1931. Dans le décor d’un Parc national, le zoo et les vieilles traditions populaires attirent un très gros public.

« Il seyait de montrer là, dans plusieurs salles disponibles, un premier accomplissement de collaboration entre des institutions officielles et des personnalités ou sociétés d’initiative privée, entre l’Administration, l’Art, la Littérature, la Presse et l’Économie, pour retenir la faveur de la Métropole que se disputent tant de soucis », écrit un chroniqueur d’art de la Revue de Madagascar ». L’objectif est qu’à Paris, on puisse voir en ce temps préoccupé de réalisations prochaines, ce qu’offrent, sous la direction française, « les dons d’une des races de notre Empire les plus souples au progrès ».

Dès que le gouvernement général est sollicité par le conservateur du Musée parisien, il répond avec promptitude. L’Agence économique donne, de son côté, des aloalo, des lamba et des poteries sakalava, des valiha, des tambours, des pirogues. Le Muséum également prête une collection des Lémuriens les plus caractéristiques de la Grande ile.

« De cette première base devait se constituer un rassemblement chaleureux d’œuvres et d’actions, de représentations et de concours, d’images et d’atmosphère, tout ce concert de soins, vœux, offrandes et appels à un bel avenir que doit être une Exposition. Aux produits malgaches, la standardisation assure un état civil qui rassure, mais pour les bien marier à la clientèle européenne, il faut leur donner une dot: la publicité et un trousseau chatoyant des plus belles couleurs exotiques, des expositions ! »

La consécration officielle de cet effort coordonné est donnée par le ministre des Colonies, Louis Rollin, qui préside l’inauguration de l’Exposition. À cet évènement, accourent « les boursiers de voyage, tant de sculpteurs et donateurs qui n’ont jamais quitté la France, des écrivains notoires, le charmant cosmos intercolonial des administrateurs avec leurs femmes et leurs enfants. »

C’est avec empressement que le flot des visiteurs se porte d’un diorama à un écrin de minerais, enchanté par la variété des petits stands, l’animation scénique de diverses présentations d’objets, le chatoiement des étoffes malgaches.

D’après le chroniqueur artistique de la Revue de Madagascar, dès l’arrivée du ministre Louis Rollin, tous sont enveloppés par la musique des chœurs malgaches. « Ces mélopées (sont) harmonieusement exaltées de voix perçantes qui ensorcellent l’oreille et la mémoire d’une incantation de cérémonies rythmiques pour la naissance, la circoncision, les mariages ou les enterrements rustiques. » Car, explique le chroniqueur, le conservateur veut que le public ait non seulement la couleur locale à quoi il est déjà habitué, mais accompagnée de ce ton local et de son local car, se demande-t-il, « Madagascar n’est-il avant tout pas toute musique   ».

Le centre de l’Exposition rassemble les numéros primés du dernier Salon d’art d’Antananarivo. « Ce salon a pris un tel développement qu’on ne pouvait le transporter tout entier.» En effet, sous l’égide du gouvernement général, le couple Heydman déploie une École d’arts appliqués qu’il fait rayonner dans la vannerie et la sparterie, la dentelle et la tapisserie, l’aquarelle et la sculpture. L’atelier laisse toute liberté à ses élèves voire cultive leur indépendance. C’est-à-dire la fantaisie, « les inspirations qui renouvellent d’invention la trame des traditions autochtones, les naïvetés malicieuses ou sentimentales des races ».

C’est ainsi que l’École protège l’essor artistique d’un « ancien razzieur de bœufs » et fait du Bara Tsida, un lauréat. D’ailleurs, toutes les belles dames, épouses des chefs de service d’Antananarivo, s’arrachent ses statuettes primitives- « et non primaires »- de pugilistes ou de bœufs qui s’affrontent. « Tout un joli monde animal de franche création indigène complète ainsi dans la céramique et la verrerie citadines la délicieuse et humoristique faune des jouets taillés par les campagnards dans la corne : ces incomparables animaux dignes des fabulistes les plus originaux faisaient l’administration d’Élémir Bourges  quand nous lui en rapportions, de nos premiers voyages, les échantillons achetés pour quelques sous au Zoma. »

De vieilles lampes taillées avec un grand style archaïque dans la pierre massive attestent que ces races ne sont pas seulement « éveillées par un génie satiriste et câlin, mais par un sentiment décoratif capable de majesté. »

Texte : Pela Ravalitera – Photo : Archives personnelles

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Publié dans Histoire, Notes du passé

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