Notes du passé: Un Institut pour la colonisation sous toutes ses formes

Publié le par Alain GYRE

Un Institut pour la colonisation sous toutes ses formes

02.12.2016 | 8:28 Notes du passé N°2310

 

L’Institut Pasteur d’Antananarivo a son origine dans le laboratoire de microbiologie qui est créé en 1899 à Tsimbazaza. Au début, c’est un laboratoire dont la mission essentielle est de fabriquer le vaccin jennérien, préventif contre la variole, et d’assurer le traitement de la rage. Dès 1897, le général Gallieni prie l’Institut de Paris de désigner pour Madagascar un de ces premiers médecins coloniaux qui commencent à s’instruire dans les laboratoires de Paris, inaugurés en novembre 1888. Pasteur prescrit, en effet, d’entreprendre sans tarder l’étude des maladies pestilentielles qui déciment les populations d’Asie et d’Afrique.

C’est le Dr Thiroux, médecin des Colonies, qui est choisi pour organiser le centre d’Antanana­rivo. Comme tous les initiateurs de la Grande ile, le Dr Thiroux en arrivant à Antananarivo, a tout à créer, locaux et personnel auxiliaire. « Sous le nom de Parc vaccinogène, le futur Institut Pasteur et son premier objectif durent aller au plus pressé qui était de produire le vaccin jennérien en quantités suffisantes pour les besoins de la population. » Dès la première année, le Service de la vaccine peut fournir 12 000 doses d’un vaccin parfaitement efficace et l’année suivante, plus de 250 000.

L’installation du Service de la rage se fait avec beaucoup plus de difficultés, car le virus fixe, expédié de France, « n’avait plus aucune virulence à son arrivée ». En se rendant à Toamasina, le Dr Thiroux peut cependant obtenir, à l’arrivée d’un bateau, une souche d’origine qui, entretenue depuis cinquante ans, sert encore à l’époque. Mais il comprend immédiatement «qu’un immense champ de recherches s’ouvrait à l’activité du bactériologiste colonial au service de l’industrie ».

C’est pourquoi il apporte aux médecins des hôpitaux l’aide du laboratoire, se charge du traitement des lépreux, étudie le charbon bactéridien des animaux et la tuberculose bovine, s’intéresse à la microbiologie agricole en sélectionnant et produisant des levures pures demandées par l’industrie locale. Il étudie enfin, la fermentation des moûts de riz en vue de la fabrication locale de bière et d’alcool. À son départ, le Dr Thiroux laisse à ses successeurs un Institut déjà bien adapté aux besoins du pays. Le Dr Neiret le remplace en 1903. Il aura pour l’assister plusieurs adjoints, des médecins militaires. Il fait des études très complètes sur la rage à Madagascar dont le virus est « plus agressif qu’en France ». Plu­sieurs autres médecins militaires succèdent au Dr Neiret qu’une courte maladie emporte en 1906.

Un civil, le Dr Salvat, médecin et pharmacien à la fois, dirige l’établissement de 1907 à 1919. Il y crée un laboratoire de chimie où les plantes et les médicaments empiriques des Malgaches sont étudiés. Il s’intéresse notamment aux questions de parasitologie humaine et animale. Entretemps, un laboratoire de recherches dirigé par un vétérinaire, le Dr Carougeau, ancien collaborateur de Yersin en Indochine, est annexé à l’Institut. Entre autres travaux considérables, il met en train la préparation locale du vaccin anticharbonneux contre l’épidémie qui décime les troupeaux de bovins.

Après le Dr Boucher qui remplace le Dr Salvat, c’est le Dr Girard qui dirige l’Institut Pasteur, de 1922 à 1940, et lui donne son organisation définitive. Les moyens, en personnel, en matériel et en locaux, sont insuffisants, « il fallait faire du neuf ». Avec l’appui du gouverneur général Marcel Olivier, l’établissement est complètement réorganisé. En 1927, les Dr Roux et Calmette reconnaissent officiellement l’Institut Pasteur d’Antananarivo comme filiale de celui de Paris.

L’objectif essentiel, assigné au développement de l’Institut, est d’en faire un centre scientifique devant travailler non seulement pour la médecine et l’hygiène, mais aussi « pour la colonisation sous toutes ses formes ». C’est ainsi que sont groupés dans un vaste domaine de six hectares avec parcs, pâturages et jardins, en vue du travail en commun, tous les laboratoires de chimie, de la recherche des fraudes alimentaires, du service vétérinaire, de chimie agricole abrités dans divers bâtiments et pavillons équipés de façon très moderne.

« Quarante années de recherches ont consacré l’activité de l’Institut Pasteur dans le domaine médical

au profit de l’hygiène et de la santé publique. C’est ainsi que la variole qui sévissait gravement à Madagascar, y a complètement disparu, la rage est maitrisée, le laboratoire des analyses biologiques avait exécuté plus de 18 000 analyses en 1949. »

Texte : Pela Ravalitera – Photo : Agence nationale Taratra

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Publié dans Histoire, Notes du passé

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