La certification GlobalGap : Quel impact sur la filière du litchi à Madagascar ?

Publié le par Alain GYRE

La certification GlobalGap : Quel impact sur la filière du litchi à Madagascar ?       

Jeudi, 10 Avril 2014 

La certification, quoique difficile et coûteuse, serait une opportunité pour les petits agriculteurs. Qu’en est-il réellement ?

 

GlobalGap, l’un des standards privés agroalimentaires les plus utilisés au monde, a été introduit dans la filière du litchi de Madagascar au milieu des années 2000. Après un engouement initial, il a connu une désaffection et, en 2009, seule une centaine de producteurs étaient encore certifiés. Une enquête menée par une équipe du Cirad et de l’Inra montre que, si la certification a un impact positif sur les producteurs qui en bénéficient, elle n’a qu’un effet très limité sur la filière dans son ensemble.

 

Créés dans les années 1990 pour répondre aux préoccupations des consommateurs, les standards privés dans le secteur agroalimentaire portaient initialement sur les questions de sécurité sanitaire. Ils se sont étendus depuis à d’autres domaines – protection de l’environnement, conditions de travail, bien-être animal – et jouent aujourd’hui un rôle croissant dans la gouvernance des filières. Leur prolifération constitue un défi pour les agriculteurs des pays en développement, qui, pour bénéficier des avantages associés aux marchés agroalimentaires à haute valeur ajoutée, doivent se conformer à ces standards et en payer les coûts de certification.

 

GlobalGap est l’un des standards privés agroalimentaires les plus utilisés au monde. Cet ensemble de bonnes pratiques agricoles visant à garantir l’hygiène et la sécurité sanitaire des produits a été introduit dans la filière du litchi de Madagascar au milieu des années 2000, à la demande des importateurs européens. A Madagascar, la production de litchis étant peu intensive, le standard GlobalGap a surtout porté sur le traitement post récolte – en particulier le soufrage – et sur la traçabilité des fruits.

 

Un standard pour le traitement post récolte des litchis

 

Le soufrage est indispensable pour assurer la conservation des litchis lors de leur transport par bateau vers l’Europe. Mais la présence de résidus de dioxyde de soufre dans l’alimentation est réglementée. Les stations de soufrage ont donc dû consentir d’importants investissements pour se conformer au standard GlobalGap dans ce domaine, ces coûts étant supportés par les exportateurs, les bailleurs et certains partenaires commerciaux.

 

L’engouement initial pour la certification GlobalGap – 1 136 producteurs de litchis et 14 exportateurs certifiés en 2007-2008 – a été de courte durée, plusieurs exportateurs ayant abandonné à la suite du tarissement des financements extérieurs. Une centaine de producteurs restaient certifiés en 2009.

 

Une analyse des performances commerciales

 

Les chercheurs se sont donc interrogés sur l’impact réel de la certification sur les performances commerciales des producteurs. En 2010, ils ont ainsi mené une enquête auprès de 505 producteurs fournissant des litchis pour le marché d’exportation : 72 producteurs certifiés en 2009, 232 producteurs non certifiés en 2009 mais certifiés au moins une fois depuis 2005, 201 producteurs n’ayant jamais été certifiés.

 

Leur analyse se fonde sur la comparaison des groupes de producteurs certifiés et des producteurs ayant été certifiés précédemment ; le groupe des producteurs n’ayant jamais été certifiés permet d’étudier les déterminants de la sélection des producteurs par les exportateurs.

 

Des avantages très relatifs pour les producteurs certifiés

 

L’analyse économétrique révèle que les producteurs ayant été certifiés au moins une fois et les producteurs n’ayant jamais été certifiés ont des profils très différents, mais que cette différence n’est pas liée à l’introduction du standard : en 2005 déjà, les premiers vendaient davantage que les seconds, et ils étaient plus nombreux à entretenir une relation de long terme avec leur acheteur principal.

 

D’une manière générale, la certification a un impact positif. Les producteurs certifiés vendent de plus grandes quantités de litchis à un prix plus élevé, mais ces avantages sont très relatifs puisque seuls les producteurs qui transportent eux-mêmes leur récolte aux stations de soufrage en bénéficient. Ils sont probablement liés au fait que ces stations offrent aux produits certifiés des lignes de tri spécifiques et garantissent aux producteurs certifiés un accès prioritaire, ainsi qu’une prime pour les encourager à leur confier des volumes importants.

 

La certification : un effet limité sur la filière

 

Même si la certification a un effet positif sur les producteurs qui en bénéficient, son impact à l’échelle de la filière reste très limité. Elle ne touche en effet qu’un petit groupe de producteurs à la fois très spécifique et très minoritaire.

 

Ces résultats contredisent l’idée selon laquelle, quoique difficile et coûteux, le processus de certification serait une opportunité pour les petits agriculteurs. Ils montrent que les standards privés n’ont qu’un impact limité sur les producteurs lorsqu’ils sont instrumentalisés par l’aval des chaînes de valeur dans le seul but d’accroître leur compétitivité. Cette situation pourrait toutefois évoluer.

 

Durant la campagne 2010-2011, la présence de résidus de soufre a été détectée sur des litchis de Madagascar destinés de l’Union européenne, ce qui a incité les acteurs de la filière malgache à prendre des mesures pour garantir la pleine conformité de leurs produits avec les réglementations. Une telle stratégie pourrait se traduire par un regain d’intérêt pour le standard GlobalGap et, à terme, par une segmentation du marché : les exportateurs certifiés auraient accès au marché européen, tandis que les exportateurs non certifiés se reporteraient sur des marchés moins exigeants.

 

Source : CIRAD  Subervie J., Vagneron I., 2013. A drop of water in the Indian Ocean? The impact of GlobalGap certification on lychee farmers in Madagascar. World Development, 50 : 57-73

La Gazette

Publié dans Revue de presse

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